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dialectique a beau être l’expérience, qui renferme un élément empirique, néanmoins, au point d’arrivée, l’idée de Dieu est séparée des faits empiriques particuliers qui étaient au point de départ, et libre de toute ressemblance à ces faits, quoique ces faits en constituent la démonstration et la justification.

Bref la dialectique est un mouvement de la pensée pure, mais possible seulement en présence d’une matière de l’intuition. La pensée, telle que nous la connaissons, est essentiellement médiate, elle requiert, pour s’exercer, une donnée immédiate, et c’est dans la sensation, arrière-plan nécessaire de tout le procès dialectique, que nous devrons, autant que notre science actuelle est en question, chercher cet élément immédiat. Mais l’unité de l’idée et de l’être, poursuivie par la dialectique, ne sera pourtant pas perçue, comme le veulent Jacobi et les philosophes de l’école intuitive, par une intuition spéciale de l’esprit, ou évidente par l’inspection directe de la nature de la pensée. C’est une unité médiate qui consiste en ce que chacun des deux éléments, entre soi-même et la vérité, requiert la médiation de l’autre. Hégel rejette l’intuition, si, par intuition, il faut entendre le Unmittelbares Wissen de Jacobi, qui saisit immédiatement l’unité de l’être et de la pensée. C’est au sens kantien qu’il admet l’intuition, l’Anschauung, puisque, sans l’existence sensible et finie de l’univers, l’idée n’a pas de vérité. Il n’y a pas savoir immédiat, mais dans le savoir il y a un élément immédiat. À la vérité, la définition même du savoir comme l’unité du médiat et de l’immédiat implique, et qu’il y a un immédiat, et que cet immédiat ne peut être savoir.

C’est à l’analogie d’une plante qui se développe que Hégel a recours, pour nous faire comprendre la manière dont la notion se décompose et se fragmente en jugements distincts. Or, lorsqu’un arbre grandit, l’élément actif est contenu dans la semence : l’air, la terre, l’eau, quoique nécessaires au développement de l’arbre, ne jouent pas un rôle actif dans sa croissance. Seule la nature de la graine détermine qu’une plante sera reproduite, et quelle plante. Et cependant les conditions environnantes sont des conditions en l’absence desquelles la graine ne peut réaliser la fin de sa nature. Dans cette comparaison, la graine correspond à la catégorie de l’être, la plante qui a atteint son point de maturité à l’idée absolue, et la terre, l’air et l’eau, à la matière donnée dans l’intuition. En fait, la ressemblance n’est pas parfaite, car des quantités différentes