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plexes totales ; pas plus que je ne puis concevoir les couleurs, par exemple, hors de cette coordination naturelle des impressions de lumière qui affectent simultanément les divers points continus de cette toile nerveuse que nous appelons rétine. Les hommes qui rêvent, les animaux voient, dites-vous, des rapports de grandeur, de ressemblance, entre les intuitions ou les images présentes ; donc les images qui en sont la suite ne dépendent pas plus de l’autopsie que les intuitions sensitives ; elles sont également accompagnées d’affections, s’abstraient, se combinent de même.

Je vous accorde que les intuitions de la vue, par exemple, sont telles qu’elles renferment en elles certains rapports de grandeur ou d’extension, de ressemblance ou de différence entre elles, rapports qui pourront dans la suite en être séparés ou abstraits à l’aide du langage et par une opération de l’esprit qui dépend évidemment de l’autopsie. Puisqu’en effet de semblables idées de rapports peuvent être abstraites des intuitions totales, elles peuvent aussi être considérées logiquement comme y étant renfermées ou comprises dans l’origine, et avant l’autopsie même. Mais que ces rapports soient perçus en eux-mêmes et hors des intuitions ou images, avant que l’abstraction de l’esprit ait pu les en détacher ; qu’ils fassent seuls images dans l’esprit, et qu’ils se coordonnent ou se combinent ainsi à part des intuitions ou des images primitives dans lesquelles ils sont réellement confondus, et de manière enfin à donner lieu à des coordinations immédiates et subséquentes de rapports, comme phénomènes réels, distincts, voilà ce que je ne puis admettre, et vous m’auriez fait plaisir de me citer des exemples qui puissent suppléer ici à mon défaut d’intelligence. Je suis si loin d’admettre (avant l’autopsie) des coordinations de rapports que je n’adopte même pas les premières intuitions comparatives comme réellement distinctes des intuitions sensitives, à moins qu’on n’entende par intuitions comparatives celles dont l’esprit pourra déduire par la suite les différentes idées de rapport ; à la différence des intuitions purement sensitives qui pourraient avoir un caractère tel que l’esprit ne pût en déduire aucun rapport. Telles seraient par exemple les couleurs : si elles n’étaient pas naturellement coordonnées dans un espace et si elles se bornaient à modifier en face l’être sensitif, sans pouvoir se démêler les unes des autres, à la manière d’un pot-pourri composé de différentes odeurs, alors l’espèce des intuitions appelées comparatives ne seraient dites ainsi que relativement à la faculté de comparer qui n’existe point