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H. RICKERT
Der Gegenstand der Erkenntniss, ein Beitrag zum Problem der philosophischen Transcendenz, 92 p. Fribourg-en-Br., chez Mohr, 1892.

Il serait inexact — et très injuste — de croire, comme on se l’imagine peut-être un peu trop en France, que les recherches de pure logique ont été abandonnées, ou même négligées en Allemagne pendant les vingt ou trente dernières années. À vrai dire, ce n’est point à la théorie de la connaissance, mais bien plutôt à la psycho-physiologie, à la morale et à la sociologie qu’appartiennent les plus saillantes des productions philosophiques de l’Allemagne contemporaine, entendons celles qui ont eu quelque retentissement au dehors, dont on parle, que parfois même on lit et discute ailleurs que dans le cercle très étroit des spécialistes. Qu’on ouvre cependant les revues les plus récentes, qu’on parcoure les index bibliographiques, et l’on se convaincra promptement qu’une puissante tradition philosophique a survécu à l’écroulement des grands systèmes issus du kantisme et à la prompte déconsidération du positivisme : lwe néo-criticisme. Cette philosophie, renonçant d’ores et déjà aux aventures métaphysiques, conteste au savant que la science dite positive puisse se poser comme vraie absolument et exclusive de tout autre mode de connaissance, et, pour assigner à la science sa véritable valeur, elle étudie dans leur forme les procédés qu’emploie nécessairement l’esprit humain dans l’élaboration de la connaissance. C’est à ce titre qu’elle accorde une importance particulière à la logique générale, conçue comme la science formelle des fonctions cognitives, à l’étude de la proposition, du jugement et du raisonnement. Ce mouvement philosophique, auquel le mot de méthode générale conviendrait bien plutôt que le terme trop étroit de doctrine, s’il n’est point né d’hier, est encore représenté par bon nombre d’esprits distingués dont l’activité littéraire ne date guère que d’une vingtaine d’années. Qu’il nous suffise de citer les noms de MM. 0. Liebmann, W. Winsdelband, W. Schuppe, J. Valkelt, B. Erdmann. Nous présentons enfin aux lecteurs de cette revue l’œuvre d’un homme très jeune encore, M. H. Rickert, privat docent à l’Université de Fribourg-en-Brisgau, qui nous semble caractériser nettement celle philosophie et qui prouve au moins que la renaissance du crificisme n’est point en Allemagne ur. événement isolé ni transitoire, mais un utile et peut-être durable rajeunissement du kantisme.

I. Le doute dans la théorie de la connaissance. — Le concept de connaître