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encore une fois, le véritable but de sa polémique fût métaphysique, qu’il visât la constitution même des choses concrètes, c’est probable, mais s’il nous intéresse, c’est surtout par la portée scientifique de son œuvre, que je viens de définir.

En deux mots, Pythagore a le premier introduit dans la science générale de l’Univers les concepts intelligibles de nombre et de quantité en disant « les choses sont nombres ». En disant ensuite : « non, les choses ne sont pas nombres », Parménide et Zénon rendaient bien plus facile l’application du nombre aux choses : car rien ne s’opposait plus désormais à ce que le nombre s’y appliquât indéfiniment dans les deux sens ; rien ne s’opposait plus aux concepts scientifiques de l’infiniment grand et de l’infiniment petit. En retirant le nombre des choses, les Éléates lui restituaient son caractère de concept utilisable à volonté et indéfiniment. Ils ne l’auraient pas dit dans ces termes, mais nous pouvons bien, nous, affirmer, dans notre langage moderne, qu’ils contribuaient à la formation positive de la science, en ôtant au nombre son caractère métaphysique et absolu, pour le ramener à l’état de concept scientifique.

G. Milhaud.
Professeur de mathématiques spéciales.