constante, c’est-à-dire au fond comme actuellement donnée, une relation quelconque entre un espace qui n’existe pas et un temps encore à venir.
Une fois comprise la vraie nature du mouvement, il est facile, croyons-nous, d’opposer aux arguments de Zénon une réfutation directe. Ce philosophe décompose le déplacement total du mobile (déplacement absolu ou relatif) en un nombre infiniment croissant de déplacements plus petits. Il considère ceux-ci comme autant d’événements distincts qui concourent à produire un événement final et dont chacun est à l’égard de celui-ci une indispensable condition. Comme la série de ces événements particuliers constitutifs de l’événement final, étant infinie, ne saurait jamais être donnée tout entière, il se croit en droit de conclure que celui-ci ne saurait jamais avoir lieu. Mais les déplacements partiels que Zénon considère ne sont nullement les véritables conditions de l’événement final. Quoiqu’ils doivent se produire avant lui, il n’est pas vrai qu’il en dépende. Il leur est coordonné, mais non subordonné. Il a comme eux sa raison d’être directe et immédiate dans l’état supposé du mobile, dans la vitesse dont nous le concevons animé. Avec elle et par elle sont données toutes les positions que le mobile prendra successivement, et toutes le sont au même titre. Leur ordre de succession dans le temps n’est nullement un ordre de dépendance logique. Logiquement elles sont toutes posées à la fois avec le mouvement lui-même. Peu importe dès lors qu’elles soient en nombre indéfini. Ni le mobile, ni l’esprit qui le considère ne sont en effet tenus de les nombrer. Elles n’introduisent dans le mouvement aucune division réelle. Elles n’y marquent point des phases intrinsèquement distinctes. Le mouvement total n’est pas une suite de mouvements partiels qui se succéderaient les uns aux autres. Il est un et continu, et la continuité exclut toute division véritable. Celles qu’il nous plaît d’y considérer lui sont tout extérieures, elles n’ont aucun fondement dans sa constitution propre ; elles n’existent que par une vue subjective et arbitraire de l’esprit. C’est même pour cela qu’il est possible de les multiplier à l’infini ; car, si dans la nature du continu il n’est rien qui les motive, rien non plus n’y vient faire obstacle. Leur infinité apparente est la suite et la marque certaine de leur foncière inanité.
Ainsi la dichotomie et l’Achille nous semblent être de véritables sophismes ; mais de ces sophismes auxquels l’esprit humain est