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précise où elles s’y peuvent réduire. Aussi doit-il ignorer le mouvement, ou du moins n’en apercevoir que l’extérieur, le déplacement effectué. La définition qu’il en donnera, la seule qu’il en puisse donner, conformément à sa nature et à ses fins, ouvrira nécessairement la voie aux sophismes éléatiques. Cette définition, sans être précisément inexacte, est radicalement insuffisante. Elle n’exprime pas la véritable essence du mouvement et paraît plutôt la dissimuler. C’est que cette essence n’est pas saisissable à l’entendement proprement dit. L’idée du mouvement est une notion rationnelle qui contient la synthèse de deux déterminations opposées. Le mouvement n’est pas une simple suite de positions, mais le passage continu à une position nouvelle. C’est un devenir, et tout devenir contient à la fois l’être et le non-être. Dans l’espèce, les deux termes opposés se déterminent plus particulièrement comme intériorité et extériorité. Or nous avons fait voir plus haut que l’unité de ces deux termes et la condition indispensable de leur opposition elle-même est que celle-ci perd toute signification dès qu’on prétend la séparer de celle-là.

Cette idée du mouvement, quelques difficultés que présente sa détermination rigoureuse, n’est pas tout à fait étrangère au sens commun. Si la définition vulgaire ne l’exprime pas, néanmoins elle la présuppose et n’a véritablement de sens que par elle. D’ailleurs le mouvement n’est-il pas communément regardé comme un état du mobile. C’est donc qu’il est tenu pour autre chose qu’une simple succession de positions. Être tour à tour dans plusieurs lieux, cela ne saurait proprement s’appeler un état. Un état est une dénomination intrinsèque qui doit convenir à l’objet en quelque lieu qu’il soit et quelque relation qu’il soutienne avec les autres objets. C’est bien ainsi qu’il faut considérer le mouvement de même que la direction et la vitesse qui en sont les déterminations essentielles. Autrement le principe de l’inertie sur lequel repose la Mécanique tout entière ne présenterait plus aucun sens. Si la vitesse n’est rien d’intrinsèque et d’inhérent au mobile, comment pourrait-elle se conserver. Elle se réduit alors en effet à un simple rapport mathématique. Or la persistance d’un tel rapport peut sans doute être conçue et constatée a posteriori. Mais elle ne saurait être posée a priori, fût-ce à titre de simple hypothèse. La poser ainsi serait admettre implicitement qu’un rapport, qui n’existe que par ses termes, peut néanmoins préexister à ses termes. Comment concevoir comme