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lyse expérimentale et l’évolution de la conscience individuelle. Puis il décrit l’évolution des arts plastiques, particulièrement celle de l’art décoratif et de l’art idéal. Enfin, sous la dénomination d’arts musicaux, il considère dans leurs formes primitives la chanson, la narration et l’épopée, la danse et la musique, la mimique et le drame.

Nous ne pouvons que signaler ici la richesse de ce contenu à ceux qui n’en ont pas encore pris connaissance dans l’édition de 1905 ; nous croyons plus utile, dans les quelques lignes dont nous disposons, d’indiquer les changements qui caractérisent la nouvelle édition et qui, sans être essentiels, ne sont pourtant pas négligeables. Nous n’insistons pas sur les additions secondaires que l’on trouvera aux pages suivantes : 63, effets rythmiques de la respiration ; 84-6, 102-3, distinction de l’art et du jeu ; 135, rôle du dessin ; 140-1, 143 note, 149, 184-5, 286, 298 ; 124, 126, note en réponse à Schmarsow ; 340, la plainte funèbre, référence au récent ouvrage d’Otto Böckel, Psychologie der Volksdichtung ; 405, épopée et conte fantastique ; 415-18, nouvelle et roman.

Il faut relever spécialement trois nouveaux paragraphes complémentaires : L’art au point de vue de la psychologie ethnique (p. 6-12) ; Phénomènes élémentaires de l’imagination créatrice (p. 51-6, p. 74-5) ; L’unité des arts plastiques et musicaux (p. 548-53).

À côté de l’histoire, de la psychologie, de l’ethnologie de l’art, il y a place, selon Wundt, à une étude spéciale au point de vue de la Völkerpsychologie, qui considère l’art dans ses formes primitives et populaires avant d’avoir reçu l’empreinte du génie individuel, et qui le traite comme un produit de l’imagination collective. La psychologie ethnique a pour objet de déterminer les motifs primitifs de la production artistique spontanée, les transformations de ces motifs, et les fins de cette activité.

Tandis que la première édition de l’ouvrage ne comptait que deux principes généraux de l’activité imaginative, la deuxième édition en énumère un de plus : c’est l’activité spontanée de l’esprit dans la mise en œuvre des matériaux de la perception, ou la puissance créatrice de l’imagination, qui est plus essentielle dans le domaine de l’art que dans celui de la mythologie. D’autre part, Wundt donne une désignation différente au deuxième principe, qui s’énonce : Principe du renforcement des émotions par assimilation, et non plus par illusion. L’auteur a voulu éviter ainsi une erreur d’interprétation et une confusion possible avec la théorie de Konrad Lange, dans son livre Die bewusste Selbsttäuschung als Kern des ästhetischen Genusses.

Dans son dernier paragraphe, Wundt fait la synthèse des résultats de son investigation et formule ainsi sa conception générale : « L’art, dans chacune de ses formes et d’une manière éminente dans leur union, offre un tableau concret des objets de la vie qui préoccupent la conscience humaine, et surtout des sentiments et des états d’âme multiples liés à ces objets. L’évolution de l’art est parallèle à l’enrichissement de la conscience de la vie, et à la réalisation qui en est accomplie par la volonté et l’action… Bref, l’art, c’est la vie prise dans tous ses éléments qui tendent à l’unité. » Ainsi l’observation scientifique et intelligente des faits prépare la voie a une théorie esthétique large et féconde.

Ist Metaphysikfreie Naturwissenschaft möglich ? par L. Nelson, 1 vol in-8, i-55 p., Göttingen. Vandenbock et Ruprecht, 1908. — Dans cette étude, publiée dans les Abhandlungen der Frie’schen Schule, Nelson pose un problème très général, mais l’examine seulement à l’occasion d’une œuvre particulière, le dernier livre de Mach : son étude, pour comporter des conclusions dogmatiques, n’en est pas moins avant tout un examen critique d’Erkenntnis und Irrtum, une critique de l’empirisme évolutionniste de Mach. Mach admet comme fondement de toute connaissance l’intuition, la sensation, l’observation : mais de la sensation, nous ne pouvons faire sortir la dépendance des sensations et surtout la connaissance de cette dépendance, qui est la science même. La dépendance, que poursuit la science, implique — à tort ou à raison — la croyance à une liaison nécessaire, et l’empirisme est impuissant à rendre compte de cette idée : L’association des idées, « liaison d’éléments de représentation », ne peut expliquer l’attente « représentation d’une liaison des éléments », qui gît au fond de toute inférence, et l’intérêt biologique, loin de rendre compte de ce sentiment, le suppose bien plutôt. Rejetant la possibilité de légitimer logiquement le raisonnement par induction, Mach a recours au succès : mais le succès même n’implique-t-il pas le postulat de la régularité des lois de la nature ? D’ailleurs, Mach admet lui-même en certains passages qu’il y a autre chose que des sensations associées, que le jugement est plus qu’une observation. Qu’est-ce qui s’ajoute alors à l’observation ? Nulle part, il ne le dit. En vain, veut-il réduire les