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REVUE DE MÉTAPHYSIQUE ET DE MORALE


SUPPLÉMENT
Ce supplément ne doit pas être détaché pour la reliure.
(No DE NOVEMBRE 1908)



NÉCROLOGIE


Frédéric Paulsen.
(1840-1908.)

La mort de Fr. Paulsen, professeur à l’Université de Berlin, vient d’enlever à la philosophie allemande un de ses représentants les plus distingués. Esprit clair, élégant et souple plus que vigoureux et original, Paulsen était moins propre à renouveler les problèmes et les solutions philosophiques qu’à dégager des grandes doctrines classiques ce qu’elles gardent d’essentiel et ce qui leur donne le droit d’être enseignées. Ses préoccupations pédagogiques lui firent écrire un ouvrage considérable, précieux à consulter, sur l’histoire de l’enseignement dans les écoles et les universités allemandes de la fin du moyen âge jusqu’à nos jours. Elles le portèrent aussi à publier — donnant ainsi un exemple qui a été fort suivi en Allemagne — une Einleitung in die Philosophie, plusieurs fois rééditée et traduite en diverses langues, sorte de manuel supérieur destiné à préparer les étudiants ainsi que le grand public à l’intelligence des principales questions et des principaux concepts philosophiques. Son Système de morale, que M. Ruyssen a fait connaître jadis aux lecteurs de cette Revue, reste encore, dans ses grands traits, un livre de professeur ; il vaut par un effort pour suivre dans leur application aux problèmes suscités par l’évolution de la vie privée, de la vie domestique et de la vie sociale les principes généraux exposés et défendus en tête. Quant à ces principes mêmes, ce sont ceux de l’ « énergisme » tel que l’ont défendu sous diverses formes Hobbes, Spinoza, Shaftesbury, Leibniz, Wolff, par opposition à l’ « hédonisme » ; ce sont aussi ceux des doctrines « téléologiques » par opposition au formalisme kantien, trop désintéressé de la répercussion de nos actes sur l’existence de l’homme en société et sur la nature des rapports sociaux. — Dans le fond, cependant, tout en faisant sur la morale kantienne comme ailleurs sur la théorie kantienne de la connaissance d’assez grandes réserves, Paulsen restait animé de l’esprit de Kant, bien manifeste dans sa façon de combattre à la fois le naturalisme et le cléricalisme, dans son adhésion très ferme à la distinction de la science et de la croyance. De bonne heure il avait écrit sous le titre : Ce que Kant peut être pour nous, un article qui marquait nettement la direction de sa pensée dans ce sens-là. Son Essai d’une histoire du développement de la théorie kantienne de la connaissance est un travail précis et bien ordonné, qui sur un point important, à savoir l’époque et la nature de l’influence de Hume en combattant l’opinion traditionnelle, a provoqué des controverses utiles et de nouvelles recherches. Enfin son ouvrage d’ensemble sur Kant, qui fait partie de la collection « Fromanns Klassiker », se recommande par la simplicité élégante de l’exposition : pour avoir dans ce travail fait prédominer le Kant métaphysicien sur le Kant critique, l’auteur eut à subir, de la part de kantiens allemands qui se jugeaient eux-mêmes de plus sûrs dépositaires de la pensée du maître, des attaques d’une violence inouïe, auxquelles il répondit par quelques arguments, et surtout avec beaucoup de dignité.


LIVRES NOUVEAUX

La philosophie religieuse de Charles Renouvier, par André Arnal, 1 vol. in-4 de 335 p., Fischbacher, 1907 – Cet exposé, écrit du point de vue du protestantisme orthodoxe, est consciencieux et judicieux. On peut lui reprocher — outre