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– 13 – l’apologétique. L’examen impartial des religions positives doit les définir en leur valeur respective, situer le christianisme à l’égard des autres religions et fixer, au sein même du christianisme, le rôle de chaque confession. Elle a même le droit d’en déterminer, aussi objectivement que possible, la hiérarchie. Mais elle ne peut aller plus loin. Elle n’a pas à défendre le catholicisme à l’exception des autres formes de la vie religieuse. Et puis, M. Leclère n’est-il pas injuste à l’égard du modernisme qu’il parait assimiler (p. 23) à une philosophie religieuse invoquant l’expérience pour mieux se substituer au catholicisme positif? Or le modernisme est une attitude « positive », un retour i une grande et très ancienne tradition. Il entend ressaisir l’esprit vivant du dogme et l’exprimer en termes conformes aux exigences de la pensée moderne. 11 procède à un travail d’adaptation que l’Eglise n’a cessé d’accomplir. Ne poursuit-il pas le but que M. Leclère assigne à la philosophie religieuse? N’insère-t-il pas le catholicisme positif en notre intelligence « préalablement préparée et rectifiée » ? `! Immanence. Essai critique sur la doctrine de M. Maurice Blondel, par J. DE Tonquédrc, vol. in-16, de xv-307 p., Paris, G. Beauchesne, 1913. M. de Tonquédec réfute, du point de vue intellectualiste, la philosophie et l’apologétique de M. Blondel. Le livre est assez intéressant et suggestif par le parallèle constant qu’il établit entre les deux méthodes ou tendances essentielles qui règnent, à l’heure actuelle, dans l’apologétique catholique.. Mais il eût mieux valu, sans nul doute, fixer la part respective de vérité que détient chacun de ces courants et tenter entre eux une conciliation que de les opposer absolument l’un à l’autre et de condamner l’œuvre féconde de M. Blondel au nom d’une méthode qui peut conserver ses droits, mais qui a certainement besoin d’être vivifiée par l’apologétique nouvelle des Blondel, des Laberthonnière, des Ed. Le Roy et des Tyrrel. M. de Tonquédec expose les théories de M. Blondel en les organisant autour de l’idée d’immanence. Elles reposent sur cette affirmation que « rien ne peut entrer en l’homme qui ne sorte dé lui et ne corresponde en quelque façon à un besoin d’expansion ». M. de Tonquédec n’oublie pas de montrer que M. Blondel évite l’immanentisme absolu et établit la nécessité, pour le sujet, de sortir de son immanence et de reconnaître des réalités intrinsèquement différentes de la sienne. Ces réalités, Dieu et sa révélation en particulier, sont appréhendées par I’ action ». Car la vérité vivante résulte du mouvement « total de la vie. Le moi intégral dépasse le moi immédiat. Le surnaturel ne nous est pas imposé du dehors, il est fondé en notre nature. M. Blondel évite toutefois le subjectivisme en ajoutant que c’est la •̃ grâce qui ouvre l’homme au surnaturel et détermine en lui des faits psychiques parfaitement connaissables et distincts. La conversion substitue en nous le vouloir divin au vouloir propre. La foi est donc, avant tout, l’expérience du surnaturel, et l’on atteint l’essence vivante du dogme par la communication avec le réel divin, non par la connaissance abstraite. Il faut s’attacher à l’universalité de la « volonté salvifique » de Dieu. La religion, en cette philosophie de l’ « interdépendance est le mystérieux hymen de l’homme et de Dieu. C’est de ces prémisses que découlent les critiques adressées par M. Blondel à l’extrinsécisme et à l’intellectualisme. Et c’est au nom de ces deux tendances condamnées parM. Blondel que M. de Tonquédec attaque la philosophie de l’interdépendance. L’on entrevoit dès maintenant son argumentation. Il n’est pas jusqu’au « pluralisme» de W.James qui ne soit invoqué pour la défense de l’apologétique intellectualiste. Les objections sont d’ordre philosophique et d’ordre théologique. M. de Tonquédec attaque, tout d’abord, la partie négative de la philosophie de M. Blondel, la théorie qui semble nier la valeur de la connaissance rationnelle. 11 établit la légitimité de la connaissance fragmentaire, l’importance des éléments quantitatifs de la réalité, le point de vue de l’hétérogénéité des choses, les droits de la connaissance discursive. M. de Tonquédec ne peut toutefois négliger entièrement la part que M. Blondel attribue à la connaissance de l’entendement. Mais il en veut surtout à la « logique vivante », qui remplace le vrai par le bien et qui affirme la « nullité de la spéculation au point de vue ontologique ». M. Blondel détruit la valeur spécifique de la connaissance humaine. Il n’attribue a la pensée qu’une fonction celle de condensateur set de moteur de l’action. Mais n’a-t-elle pas un rôle « statique »? Ne peut-elle atteindre, quoique fragmentairement, du définitif? M. de Tonquédec critique ensuite la partie positive de la philosophie de M. Blondel. Il essaie de montrer qu’il y a ici confusion entre l’ actionexpérience et l’ « action-option », que ces deux modes d’action ont chacun leurs droits et qu’enfin l’action-option ne peut