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dans une participation active aux luttes et aux péripéties vivantes de sa génération et de son temps, que se conserver une impeccabilité monastique, sans rôle et sans action dans les idées productives de l’époque présente. » (p. 80).

Early Greek Philosophy, deuxième édition, par John Burnet, M. A., LL. D. : prof. de grec aux Collèges de St-Sauveur et de St-Léonard, St-Andrew. 1 vol. in-8o de xi-433 p., London, Adam et Charles Black, 1908. — M. John Burnet qui vient d’achever (un peu vite peut-être, pour les deux derniers volumes) sa belle récension de Platon, publie une deuxième édition de son Manuel d’histoire de la philosophie antesocratique. La disposition générale des matières n’a pas été changée depuis 1890. M. Burnet tient toujours, avec M. Brochard, Démocrite pour contemporain de Socrate et, en conséquence, il ne parle que de Leucippe. Il consacre un chapitre spécial à ce dernier qu’il avait d’abord (un peu arbitrairement) rapproché de Diogène d’Apollonie. Les chapitres du début ont été remaniés. Quelques allégations téméraires ont disparu. M. Burnet a mis à profit les Grieschische Denker de Gomperz, l’Apollodore de Jacoby et surtout les Vorsokratiker de Diels. — L’ouvrage reste ce qu’il était : une mise au point des meilleures monographies allemandes. Le texte est simple, clair et précis. Il n’apprend rien de nouveau : mais c’est un très bon manuel d’étude, le meilleur assurément que nous possédions. Il serait très utile qu’on en donnât une traduction au public français. Gomperz a un caractère moins précis et moins objectif. Zeller est trop compact et au surplus la dernière édition est de 1892. L’excellent Manuel de Renouvier est démodé dans beaucoup de parties. Le livre de M. Burnet a précisément les qualités d’un bon manuel, parmi lesquelles une des principales est de n’être pas trop original.

Le Journal philosophique de Berkeley (Commonplace book), par R. Gourg. 1 vol. in-8 de 168 p., Alcan, 1908. — Le Journal de Berkeley que Fraser publia pour la première fois en 1871, et où l’on trouve, sous la forme la plus primitive et la plus directe, les principes de sa première philosophie, est à ce titre très digne d’intérêt sans que pourtant il nous apprenne rien de bien nouveau sur leur signification ou leur genèse, puisque, écrit de 1705 à 1708, il est presque contemporain des grands ouvrages, de la Nouvelle théorie de la Vision par exemple, qui est de 1709. M. Gourg, en présentant cette traduction fidèle et précise comme thèse de doctorat à la faculté de Toulouse, aura, en tout cas, rendu service à tous ceux qui voudront étudier Berkeley sans avoir sous la main la grande édition Fraser. 11 a fait précéder sa traduction d’une étude où il rapproche un à un les grands écrits de Berkeley des textes de Commonplace book, et où il se laisse aller parfois à analyser ces ouvrages pour eux-mêmes, lors même que le Journal ne présentait pas une matière suffisante à la comparaison : ainsi, quoi qu’il en dise, on y trouve bien peu de chose qui annonce ou éclaire les théories morales de l’Alciphron ou le platonisme de la Siris. On peut regretter aussi qu’il se soit contenté de mettre des textes en regard les uns des autres, au lieu d’en analyser les différences ou d’essayer d’expliquer les variations des uns aux autres. À noter enfin quelques inadvertances qui étonnent, comme l’attribution à Taine de la fameuse formule de Mill sur le monde « possibilité permanente de sensations » (p. 23).

Pour montrer l’intérêt actuel de son auteur, M. Gourg cite les travaux récents dont il a été l’objet, ceux de Georges Lyon en France ou de Royce en Amérique. On s’étonne que, dans la guerre menée contre les idées abstraites, dans l’hostilité aux conceptions mathématiques de la nature, dans le parti pris de prendre les données sensibles avec toute leur hétérogénéité qualitative pour la réalité même, dans la prétention enfin de rester par là fidèle aux croyances communes et de constituer la philosophie du sens commun, toutes thèses qui tiennent la première place dans le Journal et qui semblent essentielles au berkeleyisme, M. Gourg ne signale pas de bien frappantes et curieuses affinités avec l’anti-intellectualisme contemporain, et avec le psychologisme de M. Bergson en particulier.

Littérature et criminalité, par Scipio Sighele, 1 vol. in-8, Paris, Giard et Brière, 1908. La plupart des chapitres (trois sur cinq) continuent la série des descriptions de types de dégénérés ou de criminels, d’après les œuvres des littérateurs, auxquels se plaisent les criminalistes italiens. Les œuvres étudiées ici sont : Jean Episcopo « le type scientifiquement parfait du neurasthénique moral », devenu assassin par alcoolisme, le Tullius Hermil de l’Innocent, le criminel-né, à qui le sens moral fait défaut par atrophie congénitale ( ?), l’Isabelle du Rêve d’un matin de printemps, criminelle-aliénée. Georges Aurispa (du Triomphe de la Mort), Claude Canteluco,