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mesure de l’énergie cinétique des projectiles d’hélium conduit à .

Cette convergence des résultats, en même temps qu’elle confirme définitivement l’hypothèse d’Avogadro, confère à l’hypothèse atomique une autorité nouvelle. La structure discontinue de la matière cesse d’être une simple vue de l’esprit. L’atomisme n’est pas seulement fondé dans la nature de notre entendement, comme l’ont fait voir Stallo et Hannequin. La matière pondérable est réellement composée de masses discrètes, distantes les unes des autres, pratiquement identiques les unes aux autres, que l’on peut dénombrer et peser. Maintenant, demandera le philosophe, quelle est la nature de ces masses ? Ici, le savant cesse de répondre. L’espace occupé par la « matière » d’une molécule est extrêmement petit par rapport au « diamètre de choc » de la molécule, et c’est, uniquement le diamètre de choc qui intervient dans la théorie cinétique. Si l’on s’imaginait par conséquent que les, nouvelles conceptions atomistiques suppriment les explications par les actions à distance, on se tromperait lourdement. De sorte qu’à l’échelle infiniment petite correspondant aux phénomènes dont ces théories donnent un aperçu singulièrement suggestif, les problèmes ultimes de la physique se retrouvent et se posent à nouveau. Une telle conclusion, loin d’éliminer la métaphysique du domaine de la connaissance exacte, la réintroduit au cœur même de la science. Les philosophes ne s’en étonneront point.

La Philosophie du Langage, par Albert Dauzat. 1 vol. in-12, de 331 p., Paris, Flammarion, 1912. — Ouvrage fort peu philosophique, malgré son titre et celui de la collection dont il fait partie. Ce n’est guère qu’un ouvrage de vulgarisation comme les précédents livres du même auteur, mais moins intéressant, parce qu’il s’y perd dans les généralités. Il exprime assez bien les préjugés traditionnels des linguistes contre la philosophie, qui se trouvent en accord avec l’irrationalisme aujourd’hui à la mode, et prennent par là un regain illusoire de nouveauté. Il exprime aussi les opinions











personnelles de l’auteur sur l’importance (bien exagérée) des patois et même des argots pour la formation des langues littéraires. Il exprime surtout son aversion, pour les « idées et la logique. Après avoir énoncé cette vérité de sens commun « Le langage est l’instrument de la pensée », on lui dénie aussitôt toute valeur logique, parce qu’il ignore l’abstraction et la généralisation ». On" voit que l’auteur en’est resté. à la vieille conception traditionnelle! (non pas classique, mais scolaire) et ignore la logique moderne. Il répète Les vieux anathèmes de la linguistique contre la grammaire générale » (c’est-à-dire en somme contre la philosophie du langage »), et il ne paraît pas savoir qu’elle est ressuscitée sous une forme nouvelle et rigoureusement scientifique,, par les travaux de M. Meillet. Du reste, il est étonnant que dans ce livre, où le nom et les phrases de M. Meillet sont si souvent cités, on retrouve, si peu de sa pensée.. Le Langage et la Verbomanie, essai de psychologie morbide, parOssiP-LoDBiÉ. t vol. in-8,’de 275 p. Paris, Alcan, 1912. La verbomanie est, une affection dont le caractère principal est un entraînement irrésistible à parler et à discourir. C’est <• une tendance pathologique, d’où la conscience et la volonté, ne sont pas toujours, bannies, à jongler avec des paroles du sens desquelles on ne se rend pas exactement compte »; elle est « constituée chez l’individu par l’excès de durée et d’intensité, et par le caractère anormal des manifestations verbeuses. Sont vèrbomanes- les sujets constitutionnellement enclins à bâtir, à construire ’en paroles, des fictions, souvent sous forme véridique ». Ne cherchez point les verbomanes à l’asile d’aliénés ils sont partout autour de nous, malheureusement. Et M. Ossip-Lourié, qui n’a pas pour eux la moindre pitié, les dénonce et les pourchasse de retraite en retraite. 11 nous les montre au foyer domestique, dans- la chaire du professeur, à la tribune de l’orateur, dans les salons, et il étudie les; progrès de cette maladie chez les différents peuples r on ne sera pas trop surpris d’apprendre que c’est la France qui est la plus atteinte par ce mal terrible. – Commé on l’a vu par la définition que nous avons citée, l’auteur ne semble pas attacher au mot nouveau qu’il a créé un sens bien précis tantôt il désigne par là le fait de parler beaucoup, tantôt le fait de parler pour ne rien- dire, tantôt simplement le fait de parler longtemps; être verbomane, c’est aussi avoir des tics du. langage, discourir sur ce. qu’on ne sait pas, inventer des récits imaginaires, raconter des mensonges. Au fond, ce que le mot exprime avant tout, c’est le mépris et la haine que professe M. Ossip-Lourié pour tous les gens qui, parlent, quoi qu’ils disent. Le professeur est celui dont la phraséo.logie est développée et a été officiellement constatée. Les salons sont « des milieux faux; où tout est duperie et con-