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doivent être aussi faciles que possible… à un concept déterminé ne doit correspondre qu’un seul mot », et plus loin (p. 107) : « De même que le développement technique de la machine à vapeur a conduit à la thermodynamique et aux lois de l’énergétique, de même le développement technique de la langue auxiliaire artificielle conduira à un développement scientifique de la plus haute importance : elle conduira à ordonner systématiquement les concepts ». — Dans un chapitre spécial, M. Ostwald examine la question des peines criminelles « du point de vue énergétique » (p. 115) : « c’est au point de vue énergétique que nous devons envisager les réactions que le droit établit contre les délits et les crimes ». Indiquons la solution de l’auteur en ce qui concerne la peine à infliger au meurtrier (p. 116) : « Selon nous, la meilleure au point de vue social serait la castration du meurtrier (sic) ; par cette réaction, en effet, on n’anéantirait pas sa force de travail et l’on empêcherait la transmission héréditaire de ses instincts de meurtre. »

Les nombreuses citations que nous venons de faire prouvent amplement que la « Sociologie énergétique » telle que la conçoit M. Ostwald n’est qu’un tissu de lieux communs auxquels le vocabulaire physico-chimique n’ajoute rien. Nous ne nous serions pas attardé aussi longtemps sur un aussi mince ouvrage s’il n’était signé d’un nom illustre, et si un certain nombre d’auteurs n’avaient adhéré à la doctrine inconsistante qui s’y trouve développée (Solvay par exemple). Emile Deschanel voyait partout du romantisme, M. Ostwald, de même, veut tout ramener à « l’énergétique ». La tendance à tout ramener à un point de vue unique est fréquente, elle répond à une certaine conception simpliste et métaphysique des choses. Mais il est certain qu’une telle méthode ne saurait donner des résultats positifs. Pour employer le langage de l’auteur lui-même, elle constitue « un gaspillage d’énergie. »

Le Sens et la Valeur de la vie, par Rudolf Eucken, traduit de l’allemand sur la 3e éd. par Marie-Anna Hullet et Alfred Leicht, avant-propos de H. Bergson. 1 vol. in-16 de 202 p., 2 fr. 50, Paris, Alcan, 1912. — Il a été déjà rendu compte dans la Revue de ce beau livre au moment de sa publication. La 3e éd. contenait des additions importantes dont le lecteur français bénéficie. Comme le dit M. Bergson dans l’avant-propos sympathique et éloquent où il présente l’œuvre du penseur allemand, « l’idée que l’esprit, inséré dans la nature, est véritablement créateur d’énergie et puise en lui la force de hausser toutes choses, de se hausser aussi lui-même, pour ainsi dire, à des degrés croissants de spiritualité, est le leitmotiv du présent ouvrage. On gagnera à cette lecture, comme à celle des livres d’Eucken en général, un surcroît d’énergie intérieure et de vitalité ». — La traduction, si elle laisse nécessairement échapper le charme du style allemand d’Eucken, est exacte et consciencieuse, mais elle manque un peu d’aisance. — Le volume est suivi d’un index qui en rendra l’usage plus facile.

Le Sommeil et les Rêves, par M. Vaschide, 1 vol. in-18 de 305 p., Paris, Flammarion, 1911. — On a rassemblé sous ce titre, en les résumant, les principaux articles publiés par Vaschide sur la question du sommeil et celle des rêves. On ne cherchera donc pas ici une unité qu’il’est impossible de donner à un recueil de ce genre, ni un plan d’ensemble, ni une étude complète de la question. Il aurait été préférable de donner à l’ouvrage un titre indiquant la manière dont il a été composé.

La première partie du livre comprend trois articles, sur les théories du sommeil, sur la psycho-physiologie de ce phénomène, et sur l’attention pendant le sommeil. La seconde partie est consacrée à l’historique de la question du rêve (Maury, Hervey de Saint-Denis, Freud, Mourly Vold.) La troisième renferme une étude sur la mémoire des rêves, et un essai sur la psychologie du rêve. Tous ces travaux, dont quelques-uns sont fort importants, sont déjà connus, et il est inutile de les résumer à nouveau ici.

Esquisse d’une Science pédagogique : les Faits et les Lois de l’éducation, par Lucien Cellérier (ouvrage récompensé par l’Académie des sciences morales et politiques), 1 vol. in-8 de xiii-394 p., Paris, Alcan, 1910. — M. Cellérier ne s’est pas proposé d’ajouter un livre nouveau à la liste si longue des ouvrages d’art pédagogique ; il a voulu dessiner dans ses grands traits la science pédagogique. Celle-ci, comme toutes les sciences du réel, a un double objet : classer les faits d’après leurs caractères communs, les expliquer par des lois constantes (p. viii). Tandis que d’ordinaire la recherche est subordonnée à un idéal, vient à l’appui de doctrines éthiques ou logiques, le livre de M. Cellérier (p. xi) « n’est point un recueil de conseils aux mères, c’est tout l’opposé » ; il ne dit pas aux parents : faites ceci, ne faites pas cela ; il leur demande : que faites-vous, qu’évitez-vous ? et il con-