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lisées en lui-même : plus complexe et plus une qu’un système solaire est l’âme d’un sage ou une société juste ; ces harmonies, ces équilibres, d’ailleurs, sont de moins en moins parfaitement, de moins en moins souvent réalisés, de plus en plus passagers et fragiles, à mesure qu’ils sont plus complexes et plus riches, et cela parce qu’ils ne sont pas les principes de l’existence, mais les résultats de l’évolution : la vie est quelque chose de plus fragile et de plus rare qu’un système d’étoiles ; et plus rares et plus fragiles encore que la vie sont le bonheur, la sagesse, la justice ou l’amour » (p. 286).

Les deux aspects de l’immanence et le problème religieux, par E. Thamiry. 1 vol. in-16 de 303 p., Bloud et Cie, Paris, 1908. — M. Thamiry, professeur à la faculté de théologie catholique de Lille, dans ce livre présente comme thèse de doctorat, s’efforce de combattre la doctrine de l’immanence sous ses diverses formes ; il découvre un orgueil égal et un égal danger dans des théories aussi différentes que celles de Kant, Fichte, Hæckel, Aug. Sabatier, F. Buisson et Ed. Le Roy. À ce qu’il appelle l’immanence absolue, il oppose l’immanence relative, fondée sur la vieille hypothèse des raisons séminales, facultés latentes ou puissances obédientielles. Mais il accepte la méthode d’immanence, mise en œuvre par M. Blondel, dans la mesure où elle est vraiment exclusive des doctrines de l’immanence, et ouvre la voie à l’apologétique objective et traditionnelle.

Ce livre a le défaut de contenir de nombreuses répétitions et de simplifier à l’excès les conceptions examinées en les ramenant à quelques citations ou même à une seule. D’autre part la thèse de l’auteur aurait gagné à être développée d’une manière plus indépendante, avec plus d’ampleur et de détails. Il faut bien voir que l’immanentisme n’est pas une doctrine a priori ni un principe arbitraire, il semble résulter du développement général des sciences et de la vie. C’est au philosophe ou au théologien, qui ne s’en contente pas, d’apporter ses preuves, de démontrer la nécessité de la transcendance, de justifier la fécondité théorique et pratique de telle ou telle explication d’un autre ordre. Et par exemple nous aurions aimé que M. Thamiry, au lieu de s’en tenir à nous proposer la théorie assez mystérieuse des raisons séminales, ait fait effort pour en exposer l’enchaînement propre et les multiples applications, pour en montrer le progrès dans l’histoire moderne et l’efficacité de nos jours, toutes choses qui pourraient à beaucoup ne point paraître claires et évidentes.

La Morale rationnelle dans ses relations avec la philosophie générale, par Albert Leclère, professeur à la faculté des lettres de l’Université de Berne. 1 vol. in-8, de 543 p., Paris, Alcan, 1908. — Rationalisme, idéalisme, individualisme, ces trois mots résument la pensée de M. Leclère. En d’autres termes, il déclare la guerre à l’empirisme, à l’hédonisme et au socialisme. Dès les premières pages de son livre, il est convenu que la morale doit être métaphysique, et que la métaphysique doit être spiritualiste (p. 13). Pour l’auteur, un esprit normal peut bien hésiter, au début de ces méditations, entre l’empirisme, le dogmatisme et le criticisme ; mais il aboutira naturellement à une conciliation de ses trois tendances dans un monadisme leibnitien ou renouviériste. Et, parallèlement à cette évolution métaphysique, il passera de la morale









hédoniste à la morale spiritualiste. A cette démonstration dialectique de sa thèse l’auteur joint une confirmation’historique demandant à chaque philosophe quelle est son attitude à l’égard du rationalisme, de .l’idéalisme et de l’individualisme, ï ! essaie de montrer quelle irrèsistibleattraction «  exerce cette triple doctrine. Pourtant, cette morale rationnelle • qui serait le fruit naturel de toute intelligence normale et l’œuvre Séculaire de tous les grands esprits, il reste à ia construire. Pour y parvenir, M. Leclère fait appel à des sciences au nom barbare une « Etliologîe inductive (individuelle et sociale), une ̃ « Ethocrilique » induçtive. et déductive, une « Métamorale une • Ethologie déductive ?, une « Morale pratique ». (individuelle et înterindividuelie). Que signifient ces termes ? – «  L’Elhologie inductive" n’est pas, comme on pourrait le croire, Ja science des caractères ; c’est "la screoeë dès conditions de fait, individuelles ou sociales, du jugement moral normal ». En réalité, c’est t’analyse des concepts moraux (sanction, ruéiile, devoir,.ctc.ï et de leurs conditions psychologiques et. sociologiques. Cette analyse reconnaît, en concluant, que ces concepts recèlent des éléments irréductibles àl’expérienee. Elle prépare les voies à une critique de la conscience morale (Etb.ocritiq.ue), qui afffrme l’existence d’une catégorie propre à la morale, la catégorie de la voleur. Le tort des philosophes inielleeluajistes, selon M. Leclëre, c’est de vouloir déduire anaivliquemeat ie bien de l’être. Mais il suffit de déclarer que le bien n’est rattaché a l’être que par un jugement