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488). Mais ce n’est même pas là le tiers du volume. Il contient, en outre, tous les extraits, qui se rapportent à Descartes, du Journal de Beekmann, manuscrit retrouvé à Middelbourg en 1903 (voir p. 15-78, p. 151-170, p. 331-348, 151-170, avec des lettres de Descartes de 1619). De plus, d’importants fragments mathématiques, publiés soit en 1701, soit par Foucher de Careil en 1859-1860, ont été révisés avec soin sur les manuscrits et corrigés (p. 203-330) : on y a rétabli, en particulier, les caractères cossiques, dont Descartes s’est servi dans ses premiers travaux d’algèbre. On a réuni d’autres fragments qui se rapportent aux opuscules tels que Olympica, Experimenta, Studium Bonæ Mentis, etc. (p. 171-204). On a retrouvé, non pas la totalité, malheureusement, mais le début d’un dialogue en français, La recherche de la vérité, dont on n’avait qu’une traduction latine (p. 489-532). Enfin on a donné un long supplément à la correspondance : lettres inédites de Saumaise, Chanut, Schooten, Huygens père, etc., citations de Descartes, faites de son vivant, dans les nombreux ouvrages de Mersenne, histoire d’un curieux épisode de la vie du philosophe en Hollande, etc. (p. 539-632), et, pour terminer, le Calcul de Mons. Descartes ou Introduction à sa Géométrie (p. 659-680). L’édition comprendra encore deux volumes. Le tome XI, dont l’impression est déjà fort avancée, donnera Le Monde ou Traité de la lumière et Traité de l’homme ; Description du corps humain ; les Passions de l’âme ; notes manuscrites se rapportant à l’anatomie ; et surtout un index complet et détaillé des matières contenues dans les onze volumes de l’édition. Le tome XII et dernier sera entièrement consacré à la biographie du philosophe.

La Philosophie de Newton, par Léon Bloch, agrégé de Philosophie, Docteur ès lettres. 1 vol. in-8 de 642 p. Paris, F. Alcan, 1908. – L’auteur a présenté ce livre comme thèse de philosophie à la Faculté des Lettres de Paris, et ce n’est pas là un des caractères les moins intéressants de ce travail qui est avant tout un important chapitre de l’Histoire de la pensée scientifique. « Si nous ouvrons un livre de Science de l’époque de Descartes, puis ensuite la Mécanique Céleste de Laplace, ou simplement un cours de physique en usage dans l’enseignement actuel, il y a entre ces ouvrages une différence profonde… J’ai cru trouver la raison de cette transformation de la Science dans les découvertes et l’influence de Newton. » Ces paroles que prononçait M. Bloch à sa soutenance donnent assez bien la clé de son livre. C’est à ses yeux Newton qui, par son sens pratique, par l’importance attribuée à l’expérience, par le rôle donné à la Mathématique, par l’éloignement de toute systématisation une et absolue, — comme avait été le Cartésianisme, — a réalisé l’avènement du véritable esprit positif. L’auteur dégage cette conclusion générale de ses analyses minutieuses, patientes et fort savantes de tous les travaux de Newton. Qu’il s’agisse d’Arithmétique, d’Algèbre, du Calcul des flexions, des notions fondamentales et des principes de la mécanique, de la gravitation et de la mécanique céleste, de la physique mathématique, de l’hypothèse, M. Bloch nous montre Newton substituant décidément ses vues exclusivement positives aux conceptions métaphysiques de Descartes. Le livre fait une petite place aux croyances métaphysiques de Newton, puis se termine par un appendice : « Les origines de la théorie de l’éther et la physique de Newton », où, contrairement à l’opinion courante, l’auteur nous présente Newton comme ayant hésité et oscillé entre la théorie de l’émission et celle des ondulations.

C’est là un travail considérable, témoignant des connaissances scientifiques les plus étendues et les plus précises, et qui est certainement appelé à rendre les plus grands services.

Sur le fond même de la thèse, il nous semble que l’admiration, si légitime d’ailleurs, de M. Bloch pour l’œuvre de Newton l’a conduit à certaines exagérations. Il voit trop dans cette œuvre le commencement absolu de la Science positive ; il l’oppose trop radicalement à l’œuvre de ses prédécesseurs, et, en particulier, la métaphysique cartésienne l’empêche de reconnaître toute la part de Descartes dans l’avènement ou aussi les progrès de l’esprit positif. Enfin il rapproche trop la pensée de Newton de celle de nos contemporains… Mais le livre mérite une étude plus complète, nous y reviendrons.

Ferdinand Brunetière. L’homme et l’œuvre, par George Foksegrivb, 1 vol. in-16 de 101 p., Paris, Bloud, 1908. – L’auteur de cette courte étude est sympathique à la cause que Brunetière a défendue ; il rend justice à la dignité et à l’intégrité de l’attitude qu’il a conservée aux époques les plus troubles de la vie publique et à travers tant de causes prochaines d’affaiblissement moral ; mais c’est aussi un penseur averti, qui ne peut être dupe de l’hypertrophie verbale, de la griserie du verbe, qui a été la « faculté maîtresse » de son héros. De là l’originalité singulière et la pénétration des juge-