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Willy Moog : Das Naturgefühl bei Plato (p. 169-194).

La liberté de la forme dialoguée permet à Platon d’utiliser quantité d’éléments de la pensée et de la sensibilité grecques que la plupart de ses successeurs a méconnus. M. Moog étudie successivement les comparaisons, les images, les descriptions et les mythes dans l’œuvre de Platon, et il montre que partout chez Platon on trouve un sentiment très vif et très personnel de la nature. Les comparaisons et les images sont empruntées à la vie des animaux domestiques et des abeilles, à quelques phénomènes météorologiques simples (vulcanisme, tremblements de terre, cours des eaux), enfin et surtout aux divers modes de l’activité humaine (p. 169, 171, 173). Sur 800 images environ, 80 sont tirées de la vie des animaux, 74 des phénomènes météorologiques, tout le reste de l’activité des hommes (p. 176).

Dans la mise en scène de certains dialogues (Phèdre, Lois, Banquet, Timée) on rencontre des descriptions précises et vives. Enfin les mythes, notamment les mythes eschatologiques, témoignent d’un sentiment très pénétrant de la nature (p. 191). Rarement on trouve chez Platon des traces de lyrisme subjectif. Presque toujours, l’image s’associe étroitement à une idée abstraite. La poésie platonicienne n’a rien de romantique ni de sentimental (p. 194).

Willi Lewinsohn : Zur Lehre von Urteil und Verneinung bei Aristoteles (p. 197-217).

Les deux termes, contradiction ou opposition et négation, confondus par les Éléates, sont distingués par Héraclite (p. 197). Chez Platon la notion de contradiction n’est pas encore pleinement développée. Ariste le premier distingue l’opposition (ἐναντιοτής) et la contradiction ({{lang|grc|ἀντίφασις) (p. 280). La privation implique une opposition seulement partielle, qui ne suffit pas à produire la contradiction (p. 201). Ces principes énoncés, M. Lewinsohn examine la théorie aristotélicienne du jugement. Deux tendances différentes s’y manifestent. Considérant l’affirmation et la négation comme deux faits parallèles, Aristote arrive à la notion de privation. D’autre part tout jugement implique une relation positive entre le sujet et le prédicat. La théorie de l’accident permet de considérer cette relation comme passagère et de distinguer la vérité actuelle de l’erreur future.

David Neumark : Materie und Form bei Aristoteles ; Erwiderung und Beleuchtung (p.271-322 et 391-432).

L’auteur défend vivement contre les critiques d’Isaac Husik son interprétation de la théorie aristotélicienne de la matière. Reprenant une à une les critiques formulées par Husik dans diverses revues, il les discute avec âpreté et à grand renfort de textes. Sa conclusion est que son adversaire n’entend rien à la philosophie ni à quoi que ce soit.

II. Philosophie moderne.

Ernest Altkirch : Die Bildnisse Spinozas (p. 370-380).

Nous possédons cinq portraits authentiques de Spinoza. Le plus significatif est celui qui est conserve à la bibliothèque de Wolfenbuttel. Mais le portrait de jeunesse qui se trouve dans une collection privée à Bruxelles mérite aussi l’attention (p. 372). Dans ce portrait daté de 1660, Spinoza, âge alors de vingt ans, est représenté avec la moustache et la barbe, à la manière des juifs portugais et espagnols peints par Rembrandt (p. 375). Son visage est celui d’un homme bien portant. On comprend mal en le voyant l’affirmation de Colerus, d’après lequel Spinoza fut pris vers 1661 de la maladie de poitrine, qui devait l’emporter (p. 372). En effet, une lettre de 1666 permet à M. Altkirch de conjecturer que Spinoza ne fut atteint que vers cette époque, après son séjour dans l’humide et froide maison de Rinsburg (p. 373). Son visage s’amaigrit, les joues rentrèrent, le nez ressortit comme il arrive chez les malades. Sur ce seul portrait, Spinoza a les cheveux courts. Sur les quatre autres, il porte la perruque, de forme différente suivant qu’il s’agit de la perruque de maison ou de la perruque de sortie. Quel est l’auteur de ce portrait de 1660 ? Il est possible que ce soit Spinoza lui-même, dont les talents de dessinateur et de peintre sont attestés par tous les biographes (p. 380).

Stanislaus von Dunin Borkowski : Nachlese zur ältesten Geschichte des Spinozismus (p. 61-98).

Suite de curieuses études sur divers points de l’histoire du Spinosisme.

1. « L’esprit de M. Benoit Spinosa », daté de 1697 et publié pour la première fois en 1719, est probablement (malgré l’avis contraire de Marchand, Dictionnaire historique, I, 325) l’œuvre de J. M. Lucas. M. v. Dunin Borkowski cite les dix-huit manuscrits de ce livre qui lui sont connus (p. 63). L’étude du texte montre que Lucas connaissait fort mal Spinoza (p. 66). À titre d’exemple M. v. Dunin Borkowski donne une édition critique d’une partie du chapitre 4, relatif à la doctrine de Spinoza (p. 66-67).

2. Boulainvilliers, personnage fort pieux, mais, à ce qu’il semble, de moralité