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tienne, par le développement parallèle des deux organes de l’Institut catholique de Paris : la Revue de Philosophie et la Revue pratique d’Apologétique, a donné naissance à cette Revue. Le premier numéro est de janvier 1907. Elle paraîtra tous les trois mois par fascicules d’environ 200 pages. L’intérêt de cette revue, en dehors des articles dogmatiques, qui se rattachent, semble-t-il, à la tradition de la pensée dominicaine, est dans le développement considérable donné à la bibliographie, tant philosophique que théologique, au soin minutieux avec lequel a été fait, en particulier, la recension des Revues parues dans le dernier trimestre de l’année 1906. L’étendue de l’information et l’objectivité de l’analyse promettent de faire de ce Bulletin un excellent instrument de travail.

Zeitschrift für Aesthetik und allgemeine Kunftwissenchaft, publié par M. Max Dessoir. — Première année (Quatre fascicules). Stuttgart, Verlag von Ferdinand Enke, 1906. — Le fondateur de cette Revue d’esthétique a remarqué que, dans ces dernières années, la curiosité pour les questions d’art s’était beaucoup accrue, ainsi que le nombre des philosophes ou artistes qui apportent à ces questions des préoccupations scientifiques. Il y a là une matière suffisante pour une Revue spéciale et certainement aussi un public. Actuellement, ceux qui veulent suivre la pensée esthétique contemporaine doivent la dégager de travaux divers et ne trouvent nulle part d’exposition théorique d’ensemble. C’est pour répondre à ce besoin que s’est fondée cette revue, qui paraît quatre fois par an. Chaque numéro, outre des articles sur des sujets spéciaux, contient des comptes-rendus critiques d’ouvrages d’esthétique théorique ou se rapportant à des œuvres particulières. Le programme est des plus vastes et rien de ce qui touche aux conditions générales de l’art n’en est écarté. Études sur l’histoire de l’esthétique et recherches expérimentales sur les conditions élémentaires de l’art ; analyses des impressions esthétiques ; études sur l’art des peuples sauvages et des enfants ; sur la création de l’artiste ; sur les questions générales de la poétique, de la musique, des arts plastiques ; enfin dissertations sur la place que prend l’art dans notre existence intellectuelle et sociale. Tels sont les sujets qui seront traités dans cette nouvelle publication.

Les numéros parus répondent parfaitement au programme annoncé par la Revue et, sans sortir des limites assignées, le sujet est assez vaste pour permettre dans la succession des articles une variété qui nous fait passer de la théorie esthétique de Kant à une dissertation sur les laques japonaises, d’Ibsen à la musique primitive de l’Église chrétienne. Beaucoup de ces articles sont du plus vif intérêt ; ainsi M. Theodor Lipps étudie d’une façon fort curieuse la valeur expressive de chaque ligne et quelle raison l’artiste a d’employer une ligne ronde ou serpentine pour suggérer tel ou tel sentiment. M. Konrad Lange, avec beaucoup de pénétration et un peu de subtilité aussi, commente la théorie, courante depuis le XVIIIe siècle, d’après laquelle l’art est un jeu : il montre comment cette assimilation de l’art à un jeu est une conséquence toute naturelle du classicisme qui plaçait l’art non pas dans le sentiment, mais dans la maîtrise intellectuelle sur le sentiment ; rien n’est plus juste et ne montre mieux l’opposition du classicisme et du romantisme qui renversera les termes et voudra que l’art soit d’une sincérité directe et comme une confidence involontaire. M. Georg Simmel se pose la question de la troisième dimension dans les arts plastiques. De très grands artistes s’en sont passé ; est-elle indispensable ? et pour résoudre ce problème esthétique, il cherche par une savante analyse psychologique comment naît, et à laquelle de nos facultés se rattache, la perception de cette troisième dimension. Ailleurs encore, sur le coloris, une dissertation très nourrie de faits, de M. August Kirschmann qui analyse la couleur, montre son caractère relatif et, sur les propriétés générales des teintes dites chaudes ou froides, etc., présente quantité de remarques tout à fait personnelles. D’autres articles seraient à citer sur la poésie et la musique ; mais la Revue de M. Max Dessoir est dès maintenant trop riche pour que je puisse tenter de dire tout ce qu’elle contient.

En général, ces articles sont d’une lecture assez claire et les auteurs semblent avoir voulu éviter le péché favori de l’esthéticien qui est, faute de termes propres, d’employer les mots au rebours de leur sens ordinaire. Beaucoup d’eux prennent la précaution de définir les termes essentiels, mais tous n’ont pas pour le lecteur cette amabilité ; l’article peut-être n’en perd rien de sa valeur, mais le lecteur y perd de ne pas s’en rendre compte. Quoi qu’il en soit, même si dans des spéculations de ce genre, il doit y avoir bien des mots rassemblés sans utilité évidente, — et l’allemand se prête beaucoup à ces assemblages de mots — les préoccupations esthétiques n’en sont