Page:Revue de métaphysique et de morale, année 16, numéro 6, 1908.djvu/114

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l’enseignement contemporains, l’examen des équivoques et des sophismes qui s’y rattachent, les précautions qu’on pourrait prendre pour y remédier, enfin l’indication de radicaux conventionnels pouvant servir à distinguer les diverses significations, et pouvant entrer dans une langue artificielle internationale suivant des lois fixes de dérivation. — Il s’agit donc, non de réglementer l’usage, ce qui n’est pas actuellement possible, mais de éclairer, et de prendre conscience de ses imperfections, en attendant qu’un jour, peut-être, un de nos Congrès entreprenne de fixer tout ou partie de la terminologie dans les sciences morales, comme l’ont fait les Congrès de sciences physiques et naturelles, au grand profit de leurs études respectives.

2° Pour réaliser notre programme, nous avons appliqué une méthode très particulière, et dont on aurait peine à croire qu’elle soit si efficace quand on ne l’a pas soi-même pratiquée[1]. Elle consiste à rédiger un premier texte, puis à le soumettre, en épreuves, à des hommes compétents, en assez grand nombre, d’origine et d’opinions assez différentes pour éviter toute influence d’un milieu philosophique particulier ; enfin à rédiger le texte définitif, en tenant compte de cette consultation. À priori, on pourrait s’attendre à recevoir une masse incohérente d’observations contradictoires ; en fait, il n’en est rien : les erreurs sont redressées, les lacunes ou les confusions signalées ; les points délicats, sur lesquels il subsiste des divergences irréductibles d’opinion ressortent en pleine lumière. En un mot, on aboutit à un résultat réellement instructif, et pour celui qui organise le travail, et pour ceux qui y participent, et pour les lecteurs qui s’y reportent ultérieurement.

Or, c’est là ce dont nous avons le plus pressant besoin ; et c’est aussi là-dessus que je me permets d’attirer l’attention du Congrès.

Il se fait, en philosophie, une quantité considérable de travail ; il s’y dépense une activité d’esprit, un talent, une patience, un dévouement intellectuel qui seraient un spectacle admirable si l’on pouvait l’embrasser dans son ensemble. Mais de ce travail énorme, la majeure partie se perd, parce qu’il est incoordonné, et parce que

  1. J’ai appliqué il y a deux ans la même méthode, toujours avec l’appui matériel et scientifique de la Société française de philosophie, à l’établissement d’un petit Précis raisonné de morale scolaire, destiné à satisfaire un besoin pratique immédiat, en attendant la constitution scientifique d’une déontologie positive : les résultats ont été très satisfaisants dans une matière qui semblait, par nature, devoir être fertile en vaines controverses.