termes conceptuels, mais en composant un tableau nouveau avec des éléments connus.
Je crois que c’est ce qu’Helmholtz a voulu faire ; je suis sûr que c’est ce que j’ai voulu faire, et je crois y avoir réussi ; je m’expliquerai d’ailleurs plus bas sur ce point.
Au reste, si cette critique dirigée contre Helmholtz me parait sans fondement, je vois encore moins comment M. Russell peut la concilier avec le caractère empirique qu’il attribue au postulatum d’Euclide.
Quand on fait un experimentum crucis, on sait d’avance que cette expérience peut donner deux résultats différents ; on se les représente d’avance, de façon à pouvoir se dire si c’est telle représentation qui se réalise, j’en tirerai telle conclusion ; si c’est l’autre, j’en tirerai la conclusion opposée. Si au contraire il est impossible d’imaginer un des termes de l’alternative, on doit le regarder d’avance comme absurde, et l’expérience devient inutile.
La seconde critique dirigée contre Helmholtz se rapporte au rôle des corps solides ; je me suis suffisamment expliqué sur ce point dans ce qui précède. La géométrie n’est pas un ensemble de lois expérimentales tirées de l’observation des corps solides ; mais cette observation a été pour nous l’occasion de créer la géométrie. Seulement cette occasion était nécessaire.
Un géomètre liquide dans un monde liquide pourrait-il créer la géométrie ? Peut-être discernera-t-il des figures ; mais pourquoi considérerait-il deux figures comme égales ?
Évidemment il pourrait définir cette égalité par une convention quelconque ; mais cette convention lui paraîtrait toujours arbitraire.
En un mot, il pourrait créer la géométrie (de même que Lobatcheffsky a pu créer la géométrie non-euclidienne dans un monde où il n’existe pas de solides non-euclidiens), mais il ne le ferait pas, parce qu’il n’aurait aucune raison de le faire.
Il est nécessaire de mieux expliquer le rôle occasionnel joué par les observations sur les corps solides.
Supposons qu’on ait constitué une géométrie purement qualitative, j’entends par là non la géométrie projective, mais l’Analysis situs. On sait que l’espace est continu, qu’il a trois dimensions ; on