il peut être pensé, c’est-à-dire en y recherchant la Pensée même comme condition. Cette étude ne peut conduire à la connaissance d’une pensée individuelle ; car il ne s’agit pas ici de constater un fait, mais de découvrir des conditions nécessaires. Par suite le système de ces conditions étant nécessaire est universel, et ce n’est pas ainsi la pensée individuelle qu’atteint la psychologie, mais la nature absolue de la Pensée, sans laquelle il n’y aurait ni vérité, ni par suite objet. On voit par là que la définition de la psychologie est identique à celle de la philosophie même, de sorte qu’on pouvait dire de Lagneau ou bien qu’il ne faisait que de la psychologie, ou bien qu’il ne faisait pas de psychologie.
Ce qu’il faut bien comprendre ici, c’est la nature de la conscience, laquelle suppose une synthèse du multiple en un tout ; cela est d’ailleurs évident, puisque, si l’on suppose que le tout soit décomposé en plusieurs parties, il y aura séparation entre une partie et l’autre par définition, et par suite plusieurs consciences et non une seule. Il résulte de là que la sensation pure et simple, indépendante de tout acte de pensée, ne saurait être objet de conscience, sinon pour elle ; et même pas pour elle, car, puisque tout est complexe et divisible, chacun des éléments de la sensation, en vertu du même raisonnement, ne sera que pour lui, et non pour le tout, de telle sorte qu’il n’y aura que des consciences innombrables sans lien entre elles, et, à la limite, plus de conscience du tout, sinon la conscience abstraite d’un point pour lui-même, d’un point sans étendue et sans variété. Et telle est la forme d’existence que nous supposons à la matière ; car nous considérons un être matériel comme n’étant rien de plus que la somme de ses parties, et comme n’ayant aucune propriété différente de la somme des propriétés de ses parties ; et voilà l’inconscient, au sens absolu du mot, l’inconscient qui exclut la pensée et que la pensée exclut. On peut voir par le 1er paragraphe du fragment 12 que Lagneau n’admet point du tout cette forme d’existence, sinon comme une abstraction ; ce qui ne peut exister dans la pensée n’existe pas du tout.
Il faut donc, pour qu’il y ait conscience, qu’il y ait union du multiple en un tout, et non pas union de fait, c’est-à-dire union par juxtaposition, mais union de nécessité, ou union vraie. Cela est possible par la dépendance affirmée d’un tout par rapport à un centre,