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844 REVUE DE MÉTAPHYSIQUE ET DE MORALE.

vérité. Si le dogme est un ensemble de symboles, il est autre chose que la vérité bien plus, la vérité étant spirituelle, le symbole, qui en veut être la traduction matérielle, la contredit directement. Le symbolisme,.dont quelques-uns font l’auxiliaire de la foi, n’arriverai qu’à tenir en échec la religion, à suspendre le développement de la vie intérieure. L’esprit se refuse au Dieu du mystère comme au Dieu des armées, il se refuse au Dieu qui divise, car il est lumière et bonté, car il est unité. Mais, d’autre part, si l’esprit se définit une capacité de progrès interne, il aperçoit par là même qu’il n’épuise pas son essence véritable dans ce qu’il a réalisé déjà, qu’il y a en lui, au delà de son actualité, un principe idéal dont son effort constant atteste à toute heure la présence et l’efficacité. A mesure qu’il s’approche de cet idéal de perfection, il participe davantage au Dieu intérieur ; la vie. religieuse consiste dans l’ascension perpétuelle de l’esprit, dans la déification. Parole étrange sans doute pour ceux qui conçoivent l’homme comme n’étant qu’un individu et le placent en regard d’un Dieu individu, mais qui paraitra naturelle à ceux qui, ayant pris conscience de la vie spirituelle, savent qu’on s’y élève d’autant plus haut qu’on y est au-dessus des déterminations purement individuelles, plus prés de la raison universelle qui est la racine de tout esprit, qui lui apporte la communication directe, et comme la révélation permanente du divin.

En définitive, les trois propositions génératrices du scepticisme. | de l’immoralisme, de l’athéisme sont le vrai est, le bien est, Dieu est. Autant cette conclusion est paradoxale pour le prétendu sens commun qui est l’esclave du langage et qui assimile les réalités spirituelles aux réalités matérielles, autant elle est droite et simple pour le vrai sens commun qui se refuse à séparer de l’activité spirituelle la vie intellectuelle, la vie morale, la vie religieuse. Pour le vrai sens commun, le spiritualisme positif et efficace, ce-n’est pas celui qui poursuit l’insaisissable chimère de l’absolu, de l’extra-humain, et qui délaisse pour cette vaine recherche toutes les ressources de notre nature, c’est celui qui confond sa cause avec le développement et la civilisation de l’humanité, qui vise à définir, telles qu’elles nous sont faites dans la science et dans la pratique, les conditions de la vérification, de la moralisation, de la déification. Ainsi conçue, la philosophie change d’aspect ce n’est plus une doctrine spéculative, un système auquel on accorde ou on refuse son assentiment ; c’est un guide de la vie spirituelle, une méthode pour penser et