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L. BRUNSOH.VICG. – SPIRITUALISME ET SENS COMMUN. S39 dehors, qu’elle soit nettement aperçue ou qu’elle demeure inconsciente, il y a toujours une idée à laquelle nos sentiments et nos actes sont liés et à laquelle ils doivent leur détermination. L’esprit de l’homme ne se réduit pas sans doute à un système unique ou à plusieurs systèmes d’idées ; mais vouloir en préciser le contenu en dehors de tout système d’idées, c’est prétendre le mettre hors de lui-même.

En résumé, l’esprit se définit par la capacité de former des idées ; cette capacité s’accroît à l’infini par son développement interne ; elle demeure à travers toutes ses manifestations une dans ’son essence. De telles propositions, si nous nous sommes bien fait entendre, ne sauraient, à aucun titre, passer pour des découvertes ; ce ne serait même pas ce qu’on pourrait appeler des vérités philosophiques ; ce serait l’expression la plus simple, la plus directe, de ce fait que nous pensons. Penser, c’est avoir un esprit, et l’esprit, du moment qu’il prend conscience de lui-même, se conçoit comme une activité indéfinie et une. Mais peut-être qu’en raison de sa simplicité et de. sa netteté cette conclusion sera capable de dissiper les préjugés qui ont obscurci dans l’esprit public la notion du spiritualisme, et de porter l’assise d’une philosophie universelle.

Qu’on voie d’abord l’alternative dans laquelle on s’engage d’ordinaire dès qu’on veut définir l’esprit. Tout objet de la pensée doit être déterminé ; tout ce qui est déterminé doit être posé, fixé, c’està-dire soumis à une loi qui le limite du dehors et nécessairement le fait ce qu’il est ; tout ce qui est déterminé est, qu’on s’en rende compte ou non, assimilé par là même à une chose inerte, à un objet dans l’espace ; déterminer l’esprit, c’est le nier en tant qu’esprit. Si l’esprit ne peut être déterminé, il reste qu’il soit indéterminé ; et alors l’étude de l’esprit sera toute négative. On fera- l’examen critique de toutes les catégories qu’on applique aux choses pour les comprendre, et, quand on aura montré que les catégories ne conviennent pas à l’esprit, l’étude de l’esprit sera terminée. La vie spirituelle échappe ainsi à là sphère de l’intelligibilité ; c’est par son opposition aux formes de l’entendement qu’elle se définira. Mais, si l’esprit est véritablement activité, alors disparait l’alternative du déterminé et de l’indéterminé ; nous ne sommes plus obligés ou d’identifier à une chose étendue ou de rendre mystérieuse et à ellemême inacessible la nature de l’esprit. Le déterminé suppose le pouvoir qui détermine. L’esprit est déterminant ; il est non l’objet, mais