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R. ELTCKEN. – LA PIIILOSOPHIE ET LE MOUVEMENT RELIGIEUX. 415 S e 1- .£0, v_

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Eev. Meta. T. V. 1897. 27

individus la force contraignante de cette réalité, capable d’agir sur nous ; il n’est pas de cas où le mot de Léibnitz soit plus vrai que pour ces ̃personnalités-là. « L’individualité enveloppe l’infini ». La vie individuelle doit entrer en relation avec elles et avec les sociétés religieuses, la profondeur et la réalité positive qui est en elles peut aider à notre progrès, elle peut nous façonner et nous affermir, elle peut devenir notre bien propre.

Mais combien de problèmes soulève cette relation du présent à l’histoire, d’un homme à un autre, de l’individu à l’humanité totale 1 La philosophie se dérobe-t-elle devant ces problèmes ? Comment ce qui est laissé derrière nous, à un point de vue extérieur, comme passé, peut-il devenir, à un point de vue intérieur, présent vivant ? Comment ce qui a été expérimenté et créé par un seul peut-il se transmettre à d’autres ? Comment de grandes personnalités, avec leur individualité incomparable à toute autre, peuvent-elles donner des lois à tout le genre humain ? Et, s’il s’agit dans toute religion d’exalter la vie jusqu’à l’éternité, comment l’éternel peut-il entrer en relation avec le temps, le pénétrer, faire intervenir dans son développement, dans son avancement en âge, des commencements purs, toujours jeunes, qui rappellent toujours les hommes à elle par le charme enchanteur des sacrés souvenirs de l’enfance ? Mais ces questions, la culture la plus développée ne peut les résoudre qu’à l’aide de la philosophie. Celle-ci a beau être impuissante à tirer de soi-même une réalité positive, cependant pour développer la réalité positive donnée et la liaison de cette réalité avec la vie intégrale, on ne saurait se passer d’elle.

Si donc la philosophie a, aux divers degrés du mouvement religieux, des tâches importantes à remplir, le problème fondamental qui doit traverser tout ce labeur, c’est le- problème de l’existence humaine le problème de la liberté, l’opposition de la liberté et de la nécessité. A aucun degré le retour à la religion né s’impose à V personne par voie démonstrative celui-là seulement peut la tenir pour nécessaire, qui s’approprie et fait intérieur à soi le mouve- j ! ment spirituel, et par là transforme les exigences religieuses en nécessité interne mais pour cela il faut un acte libre de l’homme entier,.un facteur personnel ne peut pas être ici éliminé. C’est ainsi que finalement,-pour la philosophie, la bataille livrée au nom de la vérité de la religion devient une, bataille livrée au nom des grands problèmes qui lui sont propres.