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difficultés, et où les obstacles seraient seulement autant de ressorts pour accroître nos forces. Mais si les obstacles sont insurmontables, si notre effort s’épuise en luttes vaines contre eux ? Bref, nous nous trouvons aujourd’hui livrés à une crise spirituelle difficile, et nous entendons par là qu’un pessimisme pesant gagne’ de plus en plus du terrain, qu’un sentiment déprimant de petitesse et de faiblesse traverse l’humanité. Mais la chose peut prendre encore une tout autre tournure. Le fait que tous les mobiles ; de notre force, la grandeur des actions, l’éclat de la civilisation, ’né satisfont pas l’homme, n’est-ce pas le signe manifeste que sa nature) est plus profonde ? Lui serait-il aussi impossible de s’abandonner àj l’action extérieure, s’il ne sentait en lui l’existence d’un être intime plus profond que tout ce qui est simple dépense de forces ? Se trouverait-il aussi petit, s’il ne devait sans cesse prendre pour unité de mesure celle plus haute que lui fournit son essence propre ? Une petitesse que l’on perçoit d’une manière aussi aiguë, qui cause une douleur aussi âpre, est le témoignage immédiat d’une grandeur correspondante, quand bien même cette grandeur serait, cachée et comprimée Qui se trouve malheureux, a dit Pascal, de n’être pas roi, sinon un roi dépossédé ? »

Or, si cela est exact, alors le sentiment de petitesse peut se tourner en une aspiration violente à l’émancipation et au développement de la grandeur qui est au fond de notre essence, et, de l’ébranlement produit par la crise, peut se dégager un élan positif vers une vie plus vraie, plus essentielle, une aspiration à plus de profondeur et plus de simplicité, à une réalité spirituelle plus solide. a un ralliement plus puissant de tout ce que nous pouvons atteindre en fait de raison, et à un combat courageusement entrepris contre les dehors trompeurs et la platitude de la culture vulgaire. Mais, quand, à côte de cette ambition de grandeur, persiste la conscience de la petitesse et de la faiblesse humaines, n’est-il pas naturel de désirer de nouvelles. relations spirituelles et de chercher un secours dans leur force supérieure ? est-ce qu’on ne s’explique pas dès lors le retour à la religion ? Quelques éléments de petitesse et d’égoïsme que les individus et les partis puissent mêler à ces tendances, l’impulsion maîtresse reste toujours celle qui pousse l’homme à combattre pour le salut de son essence spirituelle, pour la victoire sur toutes les puissances irrationnelles qui tendaient à le déprimer • et à l’anéantir. Et, une fois qu’un tel besoin s’est manifeste, est par-