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&62 REVUE DE MÉTAPHYSIQUE" ET • Ï)E MORAIsE.

qui ’font dépendre la" perception de Factjvïté cérébrale ; et qui réduisent la matière à n’être qu’une apparence plus ou moins mal fondée, Si, au contraire, la mémoire est autre chose qu’une fonction du cerveau, le seul Sien- possible qui eut enchaîné sa nature à celle de la perception se trouve brisé la matière réconquiert sa réalité en mëmh temps que l’esprit son indépendance. Mais comment démontrer que la mémoire n’est pas une fonction du cerveau ? Cette démonstration tion ne peut se faire’saris un exanien des faits qui semblent fonder et des théories qui développent l’explication physique de la mémoire, et cet examen, nous dit M. Bergson, « sera nécessairement minutieux sous peine d’être inutile ». Minutieux, il l’est en effet comme il se promettait de l’être, mais en même temps très pénétrant et très critique, singulièrement habile à résoudre les entités schématiques sur lesquelles a trop souvent travaillé la psychologie expérimentale. II est certain en effet que si l’on considère la mémoire en bloc, elle paraîtra forcément solidaire du corps ; car il lui arrive de se modeler sur l’état de’ la substance cérébrale. Mais si le corps n’est destiné qu’à recueillir des mouvements et qu’à les transmettre, quand il ne les arrête pas, à certains mécanismes moteurs, il pourra bien conditionner la mémoire dans la mesure où elle se ramène à des tendances mécaniques, non pas la mémoire en elle-même, en tant qu’elle est représentation. Or l’expérience vérifie cette conséquence de l’hypothèse il y a deux formes de mémoire parfaitement distinctes. Autre chose est évoquer des événements qui ne se sont jamais répétés, qui ont,en même temps qu’une date un caractère de singularité irréductible, autre chose est reproduire matériellement des actes autrefois accomplis qui sont actuellement condensés et emmagasinés dans des habitudes motrices. Chacune des lectures que j’ai faites d’un texte reste présente en moi et peut, dans certaines conditions, revivre telle queUe ; la leçon apprise et répétée n’a gardé de ces diverses lectures individuelles que lès éléments communs’et impersonnels capables de’ se fondre en une action. La première espèce de mémoire, toute spéculative et désintéressée, accueille les événements, comme ils arrivent, elle en respecté et, en retient l’originalité ; la seconde espèce de mémoire ; tendue vers la- pratique, a pour objet, non pas s précisément de conserver les images anciennes, mais d’en assurer l’effet, utile, et pour cela de concentrer dans des systèmes de plus en ’plus resserrés de mouvements les déterminations de l’expérience antérieure. Et si cette mémoire automatique, assez subtile pour