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ty. delbos. •– - ?• Matière et mémoire, 3ST

des que l’ébranlement imprimé à l’organisme ne détermine, plus ni, immédiatement, ni fatalement telle réaction, dès qu’il ne se prolonge qu’en un mouvement naissant ou qu’il laisse le choix entre plusieurs événements possibles. Dès lors ce qu’il y a de subjectif dans la per- a ception ne contredit pas ou même ne dénature pas ce qu’il y a. en elle d’objectif ; car la réalité représentée n’est pas autre chose que la réalité présente, arrêtée pour nous dans son développement régulier, isolée de ce qui la précède et de ce qui la suit, nous livrant au, passage celles de ses modalités qui sont le plus tournées vers nous. Le rapport de la perception aux choses, c’est simplement le rapport de la partie au tout. C’est donc à tort que les philosophes ont cherché en nous les conditions premières et positives de la représentation du monde, qu’ils ont prétendu faire jaillir de nous la lumière qui éclaire les choses ; leur doctrine doit finir par se contredire, puisque ce qui, d’après eux, rend la perception possible est ce qui doit la rendre nécessairement subjective et par là plus ou moins illusoire. Mais toute contradiction de ce genre disparait, du moment que l’on considère que les choses sont naturellement éclairées -et que l’opération par laquelle nous en saisissons une part, essentiellement restrictive et négative, consiste à en obscurcir certains côtés, à jeter de l’ombre autour de ce qu’il nous importe de détacher. En dépit du préjugé philosophique courant, nous n’enrichissons pas le réel quand nous le percevons ; nous le diminuons au contraire d’une part de sa réalité. Mais l’acte par lequel nous le limitons ainsi n’interpose pas entre lui et nous une barrière infranchissable derrière laquelle nous pourrions l’imaginer ou le deviner, sans jamais le = saisir ; les’ nécessités mentales qu’invoquent d’ordinaire les philosophes o.nt quelque chose d’irréductible ; nous continuons inévitablement à les porter en nous, même quand nous avons la prétention de nous en affranchir ; tandis que les nécessités de l’action, qui im- ` posent en effet à la perception une certaine subjectivité, sont de celles qu’on peut réduire et l’effort croissant par lequel nous pourrons graduellement nous en abstraire nous fera retrouver dans sa pureté le réel qu’elles ont morcelé sans l’altérer essentiellement.

Ces conclusions ne sont paradoxales que pour les théoriciens qui veulent à tout prix construire le monde pièce à pièce avec des sensa- s étions préalablement vidées de tout contenu objectif ; elles sont en

complet accord avec la croyance commune, confirmée d’ailleurs par