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J.-J. GOURD. – LES TROIS .DIALECTIQUES. 309

se convertisse en sujet, comme dans le phénoménisme, bien que d’une manière tout opposée. Une nécessité analogue, se montre du côté pratique. L’absolu du plaisir a été épuré au point de ne plus répondre exactement aux possibilités de la vie affective. Une diminution de force attractive s’est par conséquent produite en lui. Mélangez le plaisir à ses conditions, comme l’a fait la morale du bien, et aussitôt un sujet agréant se réserve en face de l’objet à agréer ; mais vous obtenez le même résultat, si vous séparez lé plaisir de.toutes ses conditions. Ce plaisir absolu n’est pas en plein contact avec la volonté, et un sujet se réserve en face de lui. Or ce dualisme est aussi compromettant pour l’action que celui ,de la morale du bien. La dialectique, qui l’a fait naître, essayera donc de le faire disparaître ; et il n’y a encore d’autre moyen que de convertir l’un des termes en son opposé. Pour la symétrie des dialec̃ tiques, c’est le sujet qu’il faudrait, ici comme dans la morale de l’obligation, convertir en objet. En d’autres termes, il faudrait élever les possibilités de la vie affective au-dessus de toute passivité, de toute détermination temporelle et spatiale, il faudrait épurer le sujet au même degré que l’objet. Malheureusement on n’y parviendrait qu’en troublant la nature humaine, qu’en recourant à des procédés exceptionnels comme ceux de l’extase, et encore- n’obtiendrait-on rien que.de morbide et de passager. La dialectique essayera donc de prendre l’autre voie. Sans ôter à l’objet,sa pureté acquise, elle devra le rapprocher du sujet, le mettre à sa portée et dans ses conditions, le modeler sur lui, bref le convertir en lui.

Or, convertir en sujet l’absolu devenu objet ; l’élargir .au degré ° que réclame une vision ferme, sans lui rien enlever de sa force, et le faire entrer dans les conditions normales de la vie affective, sans lui rien enlever de sa pureté – cela peut se traduire ainsi jeter l’absolu en pleine réalité ; le transporter, avec tout l’éclat et toute la puissance qu’il doit à la spéculation religieuse, dans le monde concret d’où la spéculation l’a fait sortir ; en un mot, lui créer ce mode d’existence" qu’on est convenu d’appeler « personnel », et qui est bien le plus propre à le rehausser une dernière’fois. Il ne s’agit" pourtant pas d’une réalisation de l’absolu, au sens strict du mot.– Non, le réalisme ne .convient pas plus à ce moment qu’aux précédents. II paraîtrait même plus choquarit. Nous n’avons pas le droit de déclarer réel ce qui s’écarte à plusieurs degrésde la conscience primitive. Comment, d’ailleurs, après ce qui a étédit sur