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280 REVUE DE MÉTAPHYSIQUE ET DE MORALE.

Quant aux arguments fournis par les économistes et les moralistes, on est forcé de convenir qu’ils sont tout aussi superticiels. Les uns font intervenir les effets de la guerre qui aurait décimé la partie la plus valide de la population, oubliant que ce facteur influerait plutôt sur un état de mortalité temporaire que sur le taux de la mortalité générale ; les autres l’attribuent au service militaire obligatoire, cependant que l’Angleterre, affranchie du militarisme, accuse une diminution sensible. de la natalité.

M. Chambert, dans son enquête sur la dépopulation, publiée dans la Réforme sociale, parle du régime successoral qui porte atteinte à la puissance paternelle et qui désorganise les foyers ; c’est pourquoi, s’inspirant des idées de Le Play, il réclame la restauration de l’autorité paternelle et la liberté de tester.

M. E. Cheysson, ancien président de la Société de statistique, se trouve en désaccord complet avec son collègue M. Chambert. Il fait judicieusement remarquer que le régime successoral est le même en France, en Belgique, en Hollande, dans la Prusse rhénane, et cependantces pays offrent des natalités extrêmement dissemblables de 23 à 39 pour 100. M. Cheysson prétend que divers facteurs influent sur la natalité ; diverses causes se croisent, se contrarient et aboutissent à des effets contradictoires suivant leurs prédominances respectives. C’est ainsi que l’instinct pousse à la reproduction tandis que l’intérêt la limite ; d’autre part certains hommes dominés par les sentiments religieux appliqueraient le « croissez et multipliez ». Mais à cela M. Charles Ricbet répond « qu’il est difficile d’attribuer aux sentiments religieux un rôle quelconque dans la fécondité, puisque la natalité est deux fois et demie moindre dans les quartiers de la Madeleine et de Saint-Thomas-d’Aquin que dans ceux du Pontde-Flandre et de la Goutte-d’Or ».

M. E. Cheysson a confiance dans les effets de l’intervention législative il réclame des lois fiscales exonérant les familles nombreuses.

Mais le Dr Arthur Chervin, membre du Conseil supérieur de statistique, ne croit pas à l’efficacité des mesures gouvernementales pour augmenter le nombre des enfants dans les familles. Dans l’antiquité on retrouve la même idée, remarque-t-il César rendit des lois sévères contre les célibataires, les lois Julia et Pappia Poppcea, mais les résultats furent vains. A Athènes et à Sparte même situation, même échec. Vauban et Colbert eurent les mêmes préoccupa-