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consonnes et repousse notamment la conséquence de deux sifflantes, même de natures différentes ; lorsque deux sifflantes arrivent en contact, la première tombe et la seconde se renforce par compensation en tz, ts, tch suivant sa nature, p. ex. etzen pour ez zen „il n’était pas“, etsegurki pour ez segurki „non certainement“ etc.

Il y a d’ailleurs d’autres objections à faire à la théorie de M. de Ch. Si le basque a emprunté son verbe ou l’a créé par imitation, il n’en avait donc point lors de son passage à la vie historique, qui a pu être déterminé par le contact avec un idiome celtique ; mais ce serait là une hypothèse absurde : tout au plus pourrait-on soutenir que le basque était encore monosyllabique et qu’il avait comme le chinois, un verbe formé de racines indépendantes mais juxtaposées ; que ferait-on alors de la riche déclinaison nominale ? et comment, dans une langue monosyllabique, aurait-on pu composer quoi que ce soit ? Car le système de M. de Charencey, logique en ceci, ne fabrique point son verbe de racines nues (elles ne sont plus à la disposition de l’homme historique) mais il le compose de mots fonctionnellement variés. Il faudrait admettre que le basque a passé du monosyllabisme à l’agglutination après avoir subi l’influence d’autres idiomes ; il faudrait admettre la possibilité du développement formel[1] dans la seconde période de la vie linguistique ; ce qui n’est pas possible.

  1. Car on n’a pas encore nié que la déclinaison basque fut constituée de suffixes formels.

    C’est une grave question à examiner du reste que la nature de ces suffixes. Dans les langues aryennes, toute la dérivation se ramène à un petit nombre de racines pronominales ou verbales. En basque, dans les langues dravidiennes et dans les autres de même nature, ces suffixes, en dehors des formes verbales, semblent être exclusivement nominaux, c’est à dire qu’ils seraient constitués par des racines nues