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suis poète », sêvakudu-vu « tu es serviteur », kavi-vi « tu es poète », etc.[1]. Les langues dravidiennes ont un accusatif, mais il est souvent remplacé par le radical simple, c’est-à-dire par le nominatif[2]. Dans ces langues, les désinences dont on a retrouvé la forme originale sont des noms ou des verbes ; les dialectes vulgaires ont perdu beaucoup de ces désinences et les ont remplacées par des noms ou des verbes encore en usage avec leur signification indépendante ; ex. tam. kûda « se réunir » pour ôdu « avec », kondu « ayant pris » pour âl « par ». Les langues dravidiennes ne semblent pas partager la propriété des langues finnoise, turque, etc., de joindre les pronoms au nom pour marquer la possession, cependant elles ont une classe de noms très remarquables qui renferment tous le pronom réfléchi tâm, ex.: tandœ « père », tammœ « mère » tamayan’ « frère aîné », tambi « frère cadet », tangœ « sœur », etc. M. Caldwell pense qu’à l’origine ces mots signifiaient « sa protection, sa maternité, son directeur », etc. Ordinairement on dit en tandœ « mon père », nun tangœ « ta sœur », on trouve pourtant dans les vieux poètes endœ et nungœen « de moi » et nun « de toi » sont substitués au tam, tan « de soi » du thème : peut-être

  1. On aura remarqué dans ces derniers exemples l’harmonisation des voyelles ; c’est une particularité du télinga qui dit de même katti ki « au couteau » pour katti-ku ; et kattu-la-ku « aux couteaux » pour katti-la-ku.
  2. Il en est de même pour le génitif : on dit aussi bien tagappan’ vîdu « maison du père » litt. « père-maison », que tagappan adu vidu ; tagappan’-vidu est identique à périya-vidu « grande maison ». En tamoul, d’ailleurs, tout substantif peut devenir adjectif si l’on le place devant un autre substantif. L’adjectif et le génitif jouent dans les langues dravidiennes le même rôle. Le basque diffère ici ; il dira aita(r)en etchea « la maison du père » et etche handia « la grande maison » en intervertissant l’ordre relatif du déterminant et du déterminé.