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du phénomène local. Mais, hélas ! d’un phénomène d’autres résultent nécessairement ; toute vie aboutit à une renaissance : rien de ce qui vit ne saurait y échapper. On ne vit pas, en effet, sans sensation ; or, la sensation produit le besoin ; le besoin amène le désir ; le désir provoque, par l’illusion de l’individualité, une combinaison nouvelle d’éléments matériels ; et toute existence, avec l’illusion de l’individualité, comporte l’activité, Karma, cause efficace du bien et du mal. Le bien et le mal doivent être inévitablement punis ou récompensés, et, vu la brièveté de la vie, ils ne peuvent guère l’être que dans d’autres circonstances, jusqu’à ce que, exactement équilibrés ou détruits par cette récompense et ce châtiment, ils laissent l’activité impuissante dans l’égoïsme anéanti. Le Bouddha, pour faire comprendre sa pensée, employait une comparaison qui est devenue classique : le monde, disait-il, le substratum commun, peut être figuré par une lampe, c’est-à-dire par un récipient plat avec un bec triangulaire où s’appuie une mèche de coton ; l’huile est assimilable à l’activité et produit la flamme, la vie, par l’intermédiaire du corps qui est représenté par la mèche. Or, la flamme brûle, se voit, s’entend, se communique, passe d’une lampe à l’autre, et n’a pourtant pas d’existence indépendante : c’est un phénomène ; pour qu’il ne puisse plus y avoir de flamme, il faut qu’il n’y ait plus d’huile dans la lampe. De même, tant qu’il y aura de l’activité, il y aura de la vie. Les actions bonnes ou mauvaises que nous avons accomplies dans nos existences antérieures, pèsent sur nous du poids de toute leur inconsciente fatalité. C’est pourquoi le but que tout homme doit se proposer est uniquement d’en atténuer, d’en compenser, d’en détruire les conséquences nécessaires.