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langues, le redoublement est aussi partiellement employé pour marquer le prolongement de l’action, c’est-à-dire l’aspect imparfait.

De plus, en sanscrit et en grec, on a distingué l’action exercée par le sujet, l’action réfléchie, l’action supportée par le sujet, ce qui a donné, au sein de chaque aspect, trois voix : active, moyenne et passive.

Ici les langues slaves se joignent aux germaniques et aux romanes pour faire bande à part.

Considérons maintenant comment l’idée de temps s’est introduite au milieu des aspects.

L’aspect aoriste doit être le plus ancien, car l’idée d’action prolongée n’a pu se former que par voie d’abstraction. Il a donné à la langue grecque ses deux plus anciens temps : le futur et l’aoriste seconds. Ces deux temps (l’aoriste représentant le passé) ont dû seuls exister d’abord, car l’action instantanée ne comporte pas le présent, et l’on peut dire qu’à l’origine des langues, ce temps était inconnu.

En y réfléchissant bien, on comprendra que l’homme encore peu civilisé n’ait pas eu à parler de ce qu’il faisait, puisque cela se voyait bien, mais de ce qu’il avait fait et de ce qu’il ferait. Son horizon très borné, son manque de prévoyance et d’habitudes fixes, faisaient aussi qu’il n’avait pas à parler de ses occupations d’une manière générale, comme dans cette phrase : « Je chasse le bison tous les étés, et, l’hiver, je fais la chasse à l’ours. » La généralisation viendra plus tard.

D’ailleurs, à examiner la question au point de vue philosophique, on peut dire que le présent n’existe pas, car il n’est pas d’action présente dont chaque moment ne puisse