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vingt lignes, comme dans Cicéron. Ce n’est pas plus la construction latine usuelle que les phrases à la Bossuet et à la Chateaubriand ne sont indispensables au style français. Voyez César, voyez Cicéron lui-même dans ses lettres, voyez Tacite, en mettant de côté l’obscurité résultant de son excessive concision, défaut propre à l’auteur et non à la langue.

Les flexions casuelles viennent en seconde ligne, après la construction savante ; c’est une pensée que l’on rencontre souvent chez les Français, que les Barbares ne pouvaient se plier aux cas du latin. On voit que ces écrivains considèrent les cas comme particulièrement difficiles ; pour les Français qui n’en ont pas, soit ; mais qu’ils se transportent chez les peuples qui en ont, et ils verront que les paysans les plus illettrés, les petits enfants, se servent sans effort de tous ces cas que l’on a tant de peine à apprendre en classe. Or les barbares, ayant une fois appris les cas, leur emploi ne devait plus présenter de difficultés pour les générations suivantes.

Si le français, au moment où il apparaît comme langue littéraire, est en voie de perdre les cas, pas n’est besoin, pour se rendre compte de ce fait, de recourir aux explications citées plus haut. Les langues vont de l’analyse à la synthèse et réciproquement. Tout le monde sait que les terminaisons personnelles des verbes sont d’anciens pronoms, comme les terminaisons casuelles d’anciennes prépositions. Tant que ces suffixes gardent pour ceux qui les emploient le souvenir du rapport qui les a fait créer, tant qu’ils conservent une certaine indépendance, ils sont un fait d’analyse ; quand ils se sont fondus complètement avec le mot auquel ils étaient apposés, on dit qu’il y a