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Mais revenons à l’administration romaine au temps de l’Empire. La manière dont s’y prenait le vainqueur pour effacer les nationalités, c’était de briser les liens entre les diverses parties d’un même peuple, c’était de placer chaque commune isolément en face de l’Empire. On laissait donc aux vaincus l’autonomie communale et rien de plus. Dans les affaires de la commune, le pouvoir central n’intervenait pas, et pourvu que les impôts fussent payés, on la laissait vivre comme elle l’entendait.

Ainsi l’on détruisait l’esprit de nationalité et l’on rendait par conséquent impossible toute insurrection sérieuse, mais aussi l’on n’ajoutait à l’Empire aucun membre vivant ; toute la force politique et militaire se résumait de plus en plus dans l’administration supérieure ; les provinces ne pourront opposer aucune résistance aux envahisseurs. Cet isolement des communes est le secret de la domination de Rome ; c’est aussi l’explication de sa chute.

Mais si un pareil régime étouffait toute idée de grande patrie, il favorisait la patrie restreinte, le patriotisme du clocher, et était éminemment propre à localiser les mœurs et les idiomes. On pourrait soutenir avec raison que sous un tel régime n’aurait pu se former une langue acceptée de tous, reléguant les patois au second rang ; mais, sur les langues existantes, ce système ne pouvait avoir d’autre effet que d’accentuer les différences locales d’un même dialecte. Il y a bien loin de là à prétendre qu’il dut conduire tous les Gaulois à parler latin.


Et quels auraient été les maîtres du peuple gaulois dans l’étude de la langue latine ? Ici, nous voyons se produire une dissidence. Littré, et, après lui, M. Gidel, rapportent