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Je rencontrerai les arguments de Diez et de Littré, les chefs reconnus des écoles allemande et française ; j’y joindrai ceux de M. Brachet, qui a tant fait pour la vulgarisation des études historiques sur la langue, et de M. Gidel, dont l’Histoire de la Littérature française, excellente d’ailleurs, est universellement répandue.

Exposons d’abord l’opinion de ces savants :

Pour Diez, l’opinion que tous les peuples de langue romane ont abandonné leur idiome primitif pour parler latin est un fait tellement incontestable, que dans son grand ouvrage, il ne croit pas devoir nous expliquer le pourquoi ni le comment et nous renvoie aux auteurs qui ont traité la matière avant lui. Il débute ainsi :

« Six langues romanes attirent notre attention, soit par leur originalité grammaticale, soit par leur importance littéraire : deux à l’est, l’Italien et le Valaque ; deux au sud-ouest, l’Espagnol et le Portugais ; deux au nord-ouest, le Provençal et le Français. Toutes ont dans le latin leur première et leur principale source ».

Littré, dans son introduction de l’Histoire de la langue française, dit : « …Pour la langue française et en général pour les langues romanes, nous connaissons l’origine, puisqu’elles succèdent, sans interruption ni lacune, au latin.

M. Gidel, sur lequel nous reviendrons, développe longuement la thèse de Littré.

C’est M. Brachet qui présente la thèse de la manière la plus outrée. Nous lisons en effet, dans sa Grammaire historique : « Moins d’un siècle après la conquête, on parlait latin dans toute la Gaule ».

Est-il possible qu’un peuple de plusieurs millions d’hommes, répandu dans une vaste contrée, se dépouille