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de lui faire quelques emprunts[1]. C’était, autant que nous pouvons en juger, une langue essentiellement agglutinante, parente des idiomes touraniens et principalement du finnois, peut-être du médo-scythique ; elle ne connaissait pas la distinction des genres, elle n’avait pas de pronoms relatifs, elle confondait le nom et le verbe qui pouvaient également recevoir divers mots suffixes indiquant la personne, le temps, le lieu, la manière (c’est-à-dire que tous les mots se déclinaient et se conjuguaient), etc. Son alphabet était dépourvu d’aspirées, mais possédait des consonnes cérébrales et un plus grand nombre de voyelles que l’aryaque (elle avait entre autres é et o brefs). Le dravidien a donné naissance à plusieurs langues, qui servent encore de nos jours à plus de trente millions d’hommes, dont les principales sont le tamoul, le canara, le télinga et le malayâla. Dans la famille dravidienne, le tamoul joue le même rôle et a la même importance que le sanskrit dans la famille indo-européenne ; le canara, comme le latin, a souvent conservé la rudesse primitive adoucie par le tamoul et plus encore par le télinga cf. can. kévi « oreille » pour tam. sévi et tél. tchévi, comme latin equus pour sansk. açwa[2]. La comparaison de ces langues entre elles nous apprend quelles altérations chacune d’elles a

  1. M. Caldwell cite, entre autres, les mots nîra-m et mîna-m dont on explique péniblement la dérivation en sanskrit. Le mot nîr est essentiellement dravidien, et le mot mîn à plus forte raison. Ce dernier dérive incontestablement de min’ « briller » ; il signifie en même temps « étoile » et « poisson » dans la langue poétique tamoule.
  2. Je ne parlerai pas des ressemblances des mots dravidiens avec des mots de langues touraniennes ; elles sont plus naturelles et par suite plus nombreuses. Je dirai seulement que j’ai constaté des parentés évidentes entre quelques mots basques et leurs correspondants dravidiens, par exemple drav. ammâḷ « mère » ; basq. amavîdi « rue, chemin », basque bide– ; a « celui-là » ; basq. a ; — én’ « de moi » ; basq. éné– ; œyan’ (aiyan’) « seigneur » ; basq. œta (aita) « père. »