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desrobé chose d’importance. Et cōuersant en leur pays, ie n’y vy onc demander l’aumosne, ny gueuser qu’à des étrangers. Enfin, c’est la plus délibérée nation qui soit point, & puis dire auoir veu des filles & enfans tellement précipitez en tout ce qu’on leur commandoit, qu’ils se heurtoyent à tous coups aux portes et fenestres de rencontre iusques à se blesser, tant ils alloient viste. »

L’excellent magistrat auquel ces citations sont empruntées est d’ailleurs célèbre par l’originalité de ses appréciations. Dans un de ses autres ouvrages, L’inconstance et instabilité de toutes choses (Paris, 1610, in-4o), il prétend (feuillet 20, verso) que ave vient d’eva, car ave s’adresse à Marie, source de tous les biens, et eva, c’est au contraire Ève, source de tous les maux. Dans le même volume, on rencontre cette perle (feuillet 53, verso) : « Ô la belle instruction que Nature donne à la femme, si elle s’en voulait servir ! Lorsqu’une femme s’est noyée, Nature la renverse toute morte, pour couvrir sa honte. »

On voudra bien excuser la longueur de ces citations ; elles n’avaient d’autre but, dans ma pensée, que de montrer à quel point les membres des classes dirigeantes aux derniers siècles étaient pleins de préjugés contre les étrangers et les gens de la campagne. C’est bien le cas de répéter avec le poète :

Barbarus his ego sum, quia non intelligor ulli !

Au demeurant, et pour en revenir au manuscrit de Saint-Jacques de Compostelle, il faut remarquer que si l’on prenait au pied de la lettre les allégations d’Aymeric, les Basques du XIIe siècle se présenteraient à nos yeux