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idiomes indo-européens crurent reconnaître le pluriel neutre de préférence dans la terminaison a qui pouvait désigner le pluriel des neutres en -âni, à eux seuls cent fois plus nombreux que tous les autres réunis. Entraînés par une fausse analogie, ils affectèrent alors la désinence a à tous les neutres de quelque provenance et de quelque formation qu’ils fussent. Ces procédés ne sont nullement rares dans les langues. Nous rappelons seulement pour mémoire celui du grec changeant en πότνια l’ancien sanscrit patnî, maîtresse.

Les thèmes en a ont conservé en général plus longtemps que tous les autres les formes de la déclinaison primitive. La désinence âni n’en est qu’un exemple isolé ; nous pouvons y ajouter les pluriels en āsas dont il sera question tout à l’heure, les génitifs en asya et les ablatifs en at. Ces thèmes se rapprochent encore beaucoup, nous en avons déjà fait la remarque, de la déclinaison des pronoms et des pronominaux, la plus ancienne de toutes. La longueur de la voyelle dans vanâni, purâni, varîni, peut avoir un caractère purement virtuel et être destinée à désigner le pluriel, c’est-à-dire le grand nombre, d’une manière plus intime. Mais il ne serait pas impossible que vanâni eût été formé à l’origine régulièrement du thème vana + an + i, et que la longueur eût été appliquée plus tard, par fausse analogie, à l’avant-dernière syllabe des thèmes en u et en i. Il faut tenir compte aussi des formes du duel qui se distinguent à première vue au moins de celles du pluriel par la seule quantité : varînî, talûnî. Il est vrai que nous rencontrons à côté du pluriel çivâni le duel çivê.

L. Benlœw.