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alors, pour mieux désigner des appellatifs, la racine qui leur semblait exprimer leur attribut le plus important et comme leur plus intime essence[1].

Seuls les pronoms personnels désignaient l’objet d’une manière absolue, indubitable, au milieu d’autres mots marquant les phénomènes passagers et instables qui agissaient sur l’imagination de nos premiers pères. Seuls ils ne laissaient de côté aucun des attributs, aucune des qualités de leur objet. Le moi, le toi, le nous, le vous, les différentes désignations de la troisième personne (êtres vivants ou choses) étaient — comme nous le prouverons ailleurs — les seuls points fixes, immobiles dans le monde de la pensée. C’est cette fixité, cette immobilité, que la langue marquait par l’onomatopée am. Le son sourd de l’m, qu’on prononce en serrant les lèvres, arrête la voix et semble, du même coup, arrêter et vouloir fixer l’esprit sur un objet en l’isolant. Le suffixe am nous rappelle le cartouche d’un hiéroglyphe ; il semble désigner mieux que des noms de rois ou de grandes villes. Il appelle l’attention sur nos propres personnes et sur tout ce petit monde qui entoure un chacun de nous, ce petit monde qui nous est si familier et qui, pour nous, est tout un univers.

Le suffixe am était donc un des signes principaux auxquels on reconnaissait surtout les pronoms personnels (y compris le pronom réfléchi svayam), dans tous les genres et nombres et dans la plupart des cas. Il les différenciait d’abord le plus souvent des formes verbales

  1. Ces idées seront développées ultérieurement, dans un autre article.