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gine évidemment chaldéenne, et dont les réminiscences, nous le verrons tout à l’heure, se retrouvent chez une foule de peuples de l’ancien monde et peut-être même du nouveau, diffère essentiellement de celui que nous font connaître les vieux monuments de la Babylonie. D’où cette conclusion étrange que le symbolisme chaldéen aurait été à peu près partout en usage, sauf en Chaldée. Évidemment, la chose ne paraîtra guère admissible. Ne serait-il pas plus logique de supposer qu’il existait à Babylone plusieurs écoles religieuses possédant chacune une doctrine et des emblèmes différents ? Bien des motifs nous engageraient à adopter cette manière de voir. D’abord nous saisissons certaines traces de modifications dans les données théologico-astronomiques de ce pays, ne fût-ce que dans la primauté attribuée au soleil, après l’avoir été à la lune, et peut-être aussi dans les différents modes de groupement des corps planétaires. En second lieu, la Kabbale elle-même ne serait-elle point d’origine babylonienne ? Le prophète Ézéchiel, regardé par les Kabbalistes comme le créateur de leur doctrine, avait précisément passé de longues années en Chaldée ; il avait dû être en relation fréquente avec les sages de ce pays, et son livre porte de nombreuses et incontestables traces de l’influence des idées et du symbolisme chaldéen[1]. Or, qu’est-ce en définitive que la Kabbale, sinon un ensemble d’emblèmes, un procédé d’interprétation de la religion inconnu au vulgaire et différent de ceux qu’admet la croyance populaire ? Ne serait-on pas

  1. Fr. Lenormant, Commentaire sur Bérose, frag. i, p. 138. — Les animaux de la vision d’Ézéchiel et la symbolique chaldéenne. (Extrait du volume de 1875 des Mémoires de l’Académie de Caen.)