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de la planète Jupiter. M. Lenormant s’appuie sur ce fait que Anu, personnification du ciel, des étoiles fixes, possède le chiffre le plus élevé. D’où cette conclusion que les nombres en question expriment la mesure des distances admises par les savants de la Chaldée entre chaque astre et notre terre, regardée comme le point central de l’univers. L’éloignement de Saturne à nous étant supposé d’un sixième moindre que celui du ciel des étoiles fixes, on l’aurait exprimé par le chiffre 50. Le génie le plus voisin de nous serait Bin, le dieu de la lumière et des phénomènes atmosphériques ou météorologiques. Cette ingénieuse théorie donne lieu toutefois à plus d’une objection. D’abord Bel et Nisrak ne constituent pas des déités planétaires, non plus que Bin, et même leur caractère astronomique n’est pas clairement établi. En outre, l’ordre de classement des planètes diffère ici de tout ce que l’on a vu précédemment. En admettant même que le système suivi par les devins de la Chaldée ne soit pas primitif, qu’il résulte de progrès réalisés ultérieurement dans la science astronomique, on ne concevrait guère qu’à une époque même très-ancienne, les Babyloniens aient été assez mauvais observateurs pour regarder comme immédiatement voisins Saturne, la plus éloignée des sept planètes à eux connues, et la Lune qui est si rapprochée de nous. Enfin, dans une autre partie de son livre, l’auteur propose, des nombres attribués à Ishtar ou Vénus, et à Shin ou le dieu « Lune », une explication, fort plausible à notre avis, mais qui n’en renverse pas moins sa précédente hypothèse[1].

  1. M. Fr. Lenormant, Commentaire sur Bérose, frag. i, p. 117.