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le cadavre. Un autre ami, Henri Lambotte, le savant le plus ingénieux que la Belgique ait produit depuis longtemps, l’initia aux secrets de l’anatomie fine et aux vues si larges et si fécondes de l’anatomie comparée. Plus tard (1862-1876), ces études de sa jeunesse aideront singulièrement Chavée à prendre place parmi les chercheurs heureux de la Société d’anthropologie de Paris.

Au seuil des études théologiques (1835), la lecture de l’article Langues, dans le dictionnaire de Bergier, et la méditation quotidienne d’un livre de Thomassin, sur la prétendue identité primitive des racines hébraïques et gréco-romaines[1], imprimèrent, durant quelques trois années, une fausse direction aux recherches de Chavée, qui voulut, lui aussi, démontrer à la manière de l’érudit oratorien, suivi déjà par l’abbé Latouche et plusieurs autres, que « toutes les langues viennent de l’hébreu », ce qui, dans la pensée d’alors, devait être d’un grand secours pour la consolidation de la foi dans l’authenticité des récits bibliques, et en particulier, dans l’unité de filiation adamitique de toutes les races humaines.

C’est dans ces dispositions d’esprit que Chavée entra (1838) à l’Université catholique de Louvain, où le choix de son évêque, feu M. Dehesselle, l’avait envoyé pour la plus grande gloire de l’Église et du diocèse.

À Louvain, l’étude comparative des langues sémitiques, commencée à Namur sous la direction de M. le professeur Colson, fut continuée avec plus de zèle encore sous la savante impulsion de M. le professeur Beelen. Mais, en même temps qu’il poursuivait, à l’aide de l’hébreu, du syriaque, de l’arabe, etc., la restauration des formes premières et communes composant le parler sémitique originel et organique, Chavée, averti par la lecture du Parallèle des langues de l’Europe et de l’Inde, publié en 1836 par Eichhoff, étudiait avec ardeur la langue sanscrite, cet idiome sacré des brahmanes, et entreprenait sur l’ensemble des langues indo-européennes, dont le sanscrit n’est que la plus parfaite ou la mieux conservée, ce travail historico-comparatif de restitution des « verbes-noms simples » et des « pronoms-adverbes monosyllabiques » dont se composait à l’origine le langage commun

  1. La méthode d’étudier et d’enseigner chrétiennement et utilement la grammaire ou les langues par rapport à l’Écriture sainte, en les réduisant toutes à l’hébreu, Paris, Roulland, 1690-1693, 2 vol. in-8o.