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à la prêtrise, ce fut à coup sûr le vaste répertoire d’histoire naturelle de Mattioli, avec toutes figures de plantes et de fleurs, qui fit du jeune curieux un botaniste passionné, et, par une série de conséquences logiques, un linguiste plus passionné encore.

Cela demande une explication. On sait comment, en botanique, la classification de Tournefort et le « système des plantes » de Linné durent céder le pas à la méthode naturelle de Jussieu. C’est que ce célèbre botaniste avait distribué « les genres des plantes selon leurs ordres naturels. » Or, cet admirable classement des végétaux, basé sur des lois d’organisation et de fonctionnement, devint de bonne heure le vade-mecum du jeune collégien, soit dans ses herborisations, soit pour la construction de son herbier. Il devint tellement amoureux des classifications physiologiques que, dès la deuxième ou troisième année de ses humanités, il se mit à grouper non seulement les mots de même racine entre eux, mais encore les racines entre elles, quand celles-ci offraient de grandes analogies de signification, et, en même temps, une ressemblance frappante de structure syllabique. De 1825 à 1830, ces études comparatives n’avaient pour objet, en dehors de la langue maternelle, que les deux langues classiques et le hollandais, alors imposé à tout collégien wallon par décision du gouvernement des Pays-Bas. Mais cette langue néerlandaise, un moment négligée après la révolution de 1830, devint bientôt, pour les études anglaises et allemandes de Chavée, non seulement une base mnémonique des plus sûres, mais encore un terme de comparaison des plus lumineux.

Au petit séminaire de Floreffe (1833-1834), où, élève en philosophie, il fut chargé d’un cours de botanique, comme au grand séminaire de Namur (1834-1838), Chavée ne fréquentait guère, aux heures de récréation, que ses condisciples originaires de la partie allemande du grand-duché de Luxembourg. Ceux-là, en effet, parlant toujours entre eux leur langue maternelle, rendirent bientôt familier l’usage de l’allemand au jeune Namurois qu’ils avaient admis dans leur petite société germanique. Au grand séminaire, les jours de sortie étaient consacrés à l’étude de l’anatomie humaine, dans la salle de dissection de l’hôpital militaire de Namur. Un ami de Chavée, M. le docteur Tosquinet, alors interne à l’hôpital, lui prêta le grand Traité d’anatomie, avec planches, de Cloquet, et dirigea ses premières études sur