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pourriez retrancher de l’organisme aryaque cent verbes et trois mille noms sans nuire à sa constitution le moins du monde.

À part ses découvertes en histoire naturelle des préfixes (prépositions adhérentes au verbe), la linguistique comparative a ajouté peu de chose aux notions fort exactes que l’on possédait déjà sur la composition. Tout le monde sait depuis longtemps que, si la dérivation traduit les diverses formes d’une même idée au moyen de désinences caractéristiques, la composition s’attaque au fond même de l’idée et la transfigure parfois du tout au tout. Voyez ce que deviennent ire, aller, dans adire et abire ; cedere, marcher, dans procedere et recedere, etc.

Nous devons à la science moderne l’explication de l’origine des particules privatives qui, en composition, jouent un rôle de tous les instants. Ce qu’on appelle A privatif en grec et en sanskrit, aryaque et sanskr. ana ou anâ, gr. ανα ou ανη, — ar. et sanskr. an, gr. αν, lat. in, allem. un, angl. un, etc., — ne sont que des dérivés adverbiaux du pronom ana que nous avons vu plus haut (p. 28) avec le sens de celui-là, l’autre, celui qui est plus loin et, par suite, celui qui est absent. Digne de remarque est aussi l’histoire des deux préfixes qualificatifs WASU, sanskr. su, gr. ϝευ, ευ, richement, fortement, bien, et DUS, sanskr. dus, gr. δυς, péniblement, désagréablement, mal. Quant à la composition des noms, nous renverrons le lecteur à l’excellent ouvrage publié il y a six ans par M. Ferdinand Justi[1].

On le voit par cette trop rapide esquisse, la physiologie des mots indo-européens étudiés dans l’unité de

  1. Ueber die Zusammensetzung der Nomina in den Indo-germanischen Sprachen. Goettingen. Dieterisch. 1861, 1 vol. in-8o.