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Mais il y a des exemples de formes grammaticales perdues en sanskrit et qui se sont conservées en grec et en latin. »

Voilà qui est fort bien dit et, si j’avais connu en 1848 ces lignes quelque peu cachées de l’illustre professeur berlinois, je n’aurais certes pas alors attaché tant d’importance à la déclaration suivante : « On comprend assez par ce que nous venons de dire que, pour nous, le sanskrit n’est, pas plus que le Zend, etc., la langue mère des autres langues de l’Inde et de l’Europe. Seulement ces langues sanskrite, grecque, latine, esclavonne, gothique, etc., sont autant de sœurs plus ou moins savamment développées, plus ou moins intégralement conservées, issues les unes et les autres d’une mère commune qui ne vit plus que dans ses filles, et dont la science seule peut nous retracer le portrait[1]. »

Si j’ai tant insisté, si j’insiste encore sur la réalité aujourd’hui incontestable du fait paléontologique d’une langue aryaque, c’est que la reconstruction aussi complète que possible du parler des Aryas primitifs doit être le but immédiat de la science positive des langues indo-européennes.

Mais quel sera donc le but réel ou définitif du rétablissement scientifique des formes orales composant la langue commune des tribus aryennes, avant toute séparation ? Ce sera l’anatomie physiologique de cette langue et, par suite, l’histoire naturelle de ses développements successifs. Exécutée sur un organisme sain, cette dissection ne courra pas le risque de prendre pour un organe simple l’ankylose née de la contraction de deux membres différents. Elle ne confondra pas une monstruo-

  1. H. Chavée, Lexiologie indo-européenne, p. 40.