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reur) du Japon lorsqu’il tua leur roi, sans parler de ce que Jans Wettevrée[1], nous raconta de l’entrée du Tartare, qui, passant sur la glace, s’empara du royaume. Il nous assuroit, comme ayant été présent à tout, qu’il périt plus de Corésiens dans les bois, où ils se sauvèrent, que l’ennemi n’en tua. Ils n’ont point de honte de la poltronnerie, et ils déplorent le malheur de ceux qui sont obligés de se battre. Aussi se sont-ils souvent retirés avec perte lorsqu’ils pensoient piller quelque vaisseau d’Europe jeté par la tempête sur leur côte et qu’on leur résistoit. Leur horreur pour le sang est si grande, que sa vue seule les fait fuir, et ils n’ont pas moins de crainte des maladies et surtout des maladies contagieuses ; aussi enlèvent-ils leurs malades aussitôt qu’ils en ont, soit à la ville, soit à la campagne, pour les déposer dans des loges de paille au milieu des champs. Là, personne ne leur parle, à l’exception de ceux que le dévouement porte à les garder, et qui avertissent les passants de se détourner. Lorsque le malade n’a point d’ami qui en prenne soin, ses voisins le laissent plutôt périr que d’en approcher. Lorsqu’il y a peste dans une ville ou dans un village, on en forme les approches avec une haie d’épine et on en met aussi sur le toit infecté, afin d’avertir ceux qui pourraient l’ignorer. Il seroit facile de se servir, pour le traitement des maladies, des simples qui croissent dans la pays, mais le peuple ne les connoît pas assez, et les médecins sont presque tous au service des grands, si bien que les pauvres, qui ne peuvent faire cette dépense, se servent d’aveugles et de devins, en qui ils avoient autrefois une si grande confiance qu’ils les suivoient partout à travers les rivières et les rochers, et surtout

  1. Hollandais qui avait été fait prisonnier sur la côte de Corée en 1627 et que le roi avait envoyé à Quelpaerts pour interroger les naufragés et savoir ce qui les avait amenés sur ses terres. « Pendant mon long séjour en Corée, leur dit-il, j’ai souvent demandé au roi de passer au Japon sans avoir jamais reçu d’autre réponse, sinon qu’il ne falloit point m’y attendre, à moins que d’avoir des ailes et de voler jusque-là ; que la coutume de cette cour étoit de retenir tous les étrangers qui se trouvoient dans le pays, mais que, du reste, on ne les laissait manquer de rien, et qu’on leur fournissoit des vivres et des habits pendant toute leur vie. » Hamel, p. 29.