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si les morts reposent ou non, et si le lieu où ils sont enterrés leur convient ; sur quoi ils sont tellement superstitieux, qu’ils les changent souvent de place deux ou trois fois. Après que les enfants se sont bien acquittés de ce qu’ils doivent à leur père et à leur mère par cette longue cérémonie, s’ils ont laissé du bien, le fils aîné se met en possession de la maison, qui lui appartient avec toutes les terres qui en dépendent. Pour les autres biens, ils se partagent entre les garçons, sans que nous ayons ouï dire que les filles y aient aucune part, car les femmes n’apportent rien en mariage que leurs habits. Lorsqu’un père vient à l’âge de quatre-vingts ans, il se déclare lui-même incapable de gouverner son bien et le cède à ses enfants, qui entretiennent leur père et continuent toujours à le respecter beaucoup. L’aîné étant entré en possession des biens, fait bâtir, aux dépens de la communauté, une maison pour son père et pour sa mère, où il les loge et les nourrit.

Les Corésiens sont fort enclins à dérober et si sujets à tromper et à mentir, que l’on ne doit pas trop se fier à eux. Ils croient avoir fait une bonne action quand ils ont trompé quelqu’un ; aussi la tromperie n’est-elle pas infâme chez eux. Mais si quelqu’un peut prouver qu’on l’a trompé dans un marché de chevaux, de vaches ou de quelque autre chose, le marché est regardé comme nul, même au bout de trois et quatre mois. Ils sont toutefois assez simples et crédules, et nous aurions pu leur persuader tout ce que nous aurions voulu, car les étrangers sont fort aimés du peuple, et des moines surtout[1]. C’est du reste une population efféminée et qui ne fait pas voir dans l’occasion ni beaucoup de fermeté ni beaucoup de courage. Du moins c’est ce que nous ont rapporté plusieurs personnes dignes de foi, qui avoient été témoins des ravages que fit dans le pays le czar (empe-

  1. Il ne faut donc pas attribuer, ainsi que l’ont fait tous ceux qui ont approché des côtes de Corée, au caractère insociable de ce peuple la répugnance qu’il a toujours manifestée à se mettre en rapport avec les étrangers. Broughton, Maxwell, Basil-Hall n’ont pas vu que la conduite si réservée que l’on observait partout à leur égard était celle de gens qui sont placés sous le coup d’une loi inflexible et cruelle.