174 JOURS EN PRUSSE
À VERSAILLES
Notes rédigées jour par jour, contenant les Nouvelles vraies ou fausses, les mensonges, cancans, potins, canards, bavardages et racontars qui ont défrayé la curiosité des Français séquestrés à Versailles.
Tout est rédigé de façon à bien faire comprendre l’horrible situation qui nous a été faite.
L’ennemi approche de plus en plus, mais on espère qu’il ne se montrera pas encore aujourd’hui. Comme des condamnés à mort, on se sent presque heureux d’un sursis de vingt-quatre heures.
Les habitués partent pour Paris, comme à l’ordinaire. Quelques-uns, cependant, reculent à l’idée de rester enfermés à Paris.
Le reste de la journée se passe à attendre on ne sait pas quoi.
Peu d’instants après le départ du chemin de fer R.-D., à 11 heures, la gare est fermée. La cour du Débarcadère, d’ordinaire si animée, surtout depuis le 4 septembre, est, depuis la fermeture des grilles, comme l’entrée d’une nécropole pleine. Les boîtes aux letters continuent d’indiquer les heures des levées, mais une bande placée sur l’ouverture nous indique que la vie commerciale est aussi suspendue.
Il se fait autour de nous un silence que rien ne vient interrompre. Nos oreilles, en quelques secondes, sont tellement vides qu’elles nous font mal à force d’engouffrer un air muet qui tourbillonne à nous étourdir. Les chevaux cessent de circuler, plus de voiture…
Chacun, si communicatif il y a un moment, rentre en lui--