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les écuries royales de versailles.

du-Corps. Absolument illégales, et très vertement blâmées quelques jours plus tard par la Municipalité, ces mesures de police établissent que rien ne justifie les bruits répandus.

Cela n’empêche pas Bonnecarrère et Fontaine de faire aux Jacobins, dans la séance du 29 janvier, un rapport dans lequel, donnant comme des faits certains les indications qui ont été reconnues fausses en leur présence, ils affirment qu’il y a à Versailles, dans les différentes écuries des Gardes ou du Château, près de sept cents chevaux, tandis qu’il n’y en avait que soixante-dix le mois précédent ; que les voitures de la Cour paraissent être disposées pour un départ ; des malles étaient chargées, et les armes de ces voitures effacées.

Quels pouvaient être, en présence de l’abaissement et de l’asservissement de la famille royale, les sentiments du personnel des Écuries du roi, dans lequel la Cour avait de très anciens et très fidèles serviteurs ? Des plus bas degrés de la domesticité, le régime qui tombait vit souvent sortir ses plus féroces ennemis. À ceux qui restaient dévoués, la prudence commandait un silence qui ne put pas toujours les protéger contre les dénonciations et les persécutions.

Les pages, avec l’impressionnaibilité de leur âge, devaient être profondément troublés par les événements politiques que condamnaient leurs croyances et qui les blessaient dans leurs affections. Comme les écoliers de tous les temps, ils confiaient leurs réflexions aux livres classiques sur lesquels ils écrivaient aussi leurs noms et la date de leur passage aux Grandes-Écuries.

On retrouve ces notes au dos des cartes de géographie de leurs atlas. Les préoccupations de quelques-uns de ces jeunes gens sont encore des gamineries que la politique n’attriste pas. M. de Cantwel, « page du Roi aux Grandes-Écuries en 1789-90-91 », a écrit : « Mépriser sa femme est sottise » ; et la main d’un camarade à ajouté : « Vous estes une bête. » M. de Longueval a écrit en tête de son atlas : « Longueval, page en 1790 » ; une autre main a biffé le mot « page » et l’a remplacé par celui de « cochon » ; une autre main encore a écrit : « Le puant ». Étaient-ce des divergences d’opinions politiques qui se manifestaient dans la grossièreté de ces épithètes ?

D’autres inscriptions sont de très nettes professions de foi.