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madame de pompadour

quier de la Cour ; son frère cadet, sur lequel il s’était déchargé depuis longtemps de la partie financière de l’immense entreprise fondée au commencement du siècle par le premier des Paris, pour ne plus s’occuper que d’administration militaire. Au grand quartier général, qui plus est, le Comte de Maillebois, esprit tracassier et pervers, préparait son entrée dans le complot en attisant les haines de l’un, les convoitises des autres, par les insolentes critiques qu’il leur adressait sur les opérations du Général en chef[1].

De là sortit un nouveau plan de guerre qui consistait à envoyer 40, 000 hommes de plus à l’armée de Hanovre, sous la conduite du Maréchal de Richelieu, qui en prendrait le commandement en chef comme supérieur par l’ancienneté au Maréchal d’Estrées, avec ou sans la coopération de celui-ci, s’il se prêtait ou non à l’humiliante combinaison. En second lieu, on donnait au Prince de Soubise un corps de 25 à 30, 000 hommes qui se porterait immédiatement vers la Saxe et amuserait le Roi de Prusse sans hasarder de bataille, afin de laisser le temps aux Autrichiens de s’emparer de la Silésie. C’était une conception grandiose : pour la mener à bonne fin, il importait essentiellement de s’adjoindre Madame de Pompadour et d’obtenir par son entremise l’assentiment du Roi au choix du Maréchal de Richelieu pour le commandement en chef de l’armée reconstituée sur ces bases originales. À cet effet, on convint de s’adresser à l’abbé de Bernis, que le Roi venait d’appeler à son Conseil d’État[2], en révoquant soudainement la décision qu’il avait prise, sur la proposition du Ministre Rouillé, de l’envoyer occuper l’Ambassade de Vienne. D’anciennes relations remontant à l’époque où il débutait dans le monde le liaient à Richelieu, et aspirant déjà peut-être à remplacer le Secrétaire d’État aux Affaires Étrangères, à qui l’âge et les infirmités rendaient la tâche bien lourde, le pied lui glissait vers l’ornière des intrigues dont il

  1. Camille Rousset.
  2. 2 Janvier 1757. Bernis donne l’explication de ce changement en déclarant dans ses Mémoires « que le Roi lui réservait les fonctions de Ministre d’État après qu’il aurait rempli les Ambassades de Madrid et de Vienne, mais que S. M. s’était ravisée, sur les instances de Madame Infante, qui le croyait plus utile à ses intérêts au Conseil Royal qu’à une Ambassade. Il s’agit là, en effet, du projet d’établissement de l’Infant D. Philippe aux Pays-Bas que nous avons rapporté dans un chapitre précédent, à propos du second traité de Versailles.