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une lettre de ducis à larive.

Quelles étaient ces dames Harvey et non Hervey dont parle Ducis dans sa lettre ? Le Dictionnaire des peintres, sculpteurs, dessinateurs et graveurs du xixe siècle, par Bénézit, désigne Mlle Élisabeth Harvey comme portraitiste de l’École française. Or, nous savons par la lettre en question qu’elle était Anglaise, mais il ne peut y avoir de doute ; c’est par suite d’une erreur de sa plume que le poète a écrit Hervey au lieu d’Harvey. Il résulte, en effet, de la correspondance de Ducis[1], où nous trouvons leur nom répété plusieurs fois, que ces dames habitaient l’été à Fontenay-aux-Roses, qu’elles étaient liées avec la meilleure société littéraire et artistique de l’époque, qu’elles étaient en relations avec Bernardin de Saint-Pierre, Talma, le peintre Gérard ; et c’est bien d’elles qu’il est question dans la lettre. La jeune artiste avait demandé à Ducis de faire son portrait, entouré de sa famille, comme l’avait fait pour Bernardin de Saint-Pierre[2]. « J’ai reçu une seconde lettre charmante de Mme Harvey, écrit Ducis à l’auteur de Paul et Virginie. Elle m’exprime le désir de Mlle sa fille Élisabeth et le sien pour que le pinceau fidèle et agréable qui vous a peint peigne aussi ma pauvre et vieille tête. J’y consens très volontiers, et je reçois cette offre comme une faveur que me font le talent, la grâce, la jeunesse et la beauté. Mais elle ne pourra pas me peindre avec ma femme et mes enfants. Il n’y a plus pour moi de tableau de famille. » En effet, les deux filles qu’il avait eues de sa première femme étaient mortes jeunes, et il n’avait pas eu d’enfant avec sa seconde femme, qu’il avait épousée peu de temps après la mort de sa mère, survenue en 1787.

Mlle Élisabeth Harvey a exposé plusieurs fois au Salon ; outre le portrait de Bernardin de Saint-Pierre, entouré de sa famille, qui a figuré au Salon de 1804, et dont l’esquisse se trouve au Musée de Rouen, elle a exposé : en 1802, différents portraits ; en 1806, Malvina pleure la mort d’Oscar et ses compagnes cherchent à la consoler ; un portrait d’homme et deux études ; en 1808, trois portraits ; et en 1812, Edwy et Elgiva, scène de l’histoire d’Angleterre.

Le 8 vendémiaire an xiv (30 septembre 1804), Ducis écrivait

  1. Lettres de Jean-François Ducis, publiées par Paul Albert, 1879, page 166, 187, 200, 204 et 212.
  2. Op. cit., page 187.